La drogue je connaissais ca. Et depuis bien longtemps. Comme tout le monde j'avais commencé en premier lieu par un simple joint. Je m'en rappel encore. Avec une bande de potes au lycée, nous avions séché l'heure de mathématiques pour aller fumer derrière le gymnase. Je devais avoir quinze ou seize ans. Il ne m'a pas fallu beaucoup de temps avant de planer. Je m'étais senti totalement libre et c'était comme si tous les problèmes que j'avais s'étaient évaporés en quelques secondes. En revanche les drogues dures j'y ai goûté quelques années plus tard. C'était après le décès de ma petite-amie et j'avais complètement disjoncté. Tout ce qui m'importait était de me détruire en passant la plus part de mon temps défoncé à la coke et à divers alcools. Mélange qui soit dit en passant était très mauvais pour mon coeur de pauvre petit cardiaque. Quand j'y repense, tout ca c'était une sorte de suicide. Lent, mais très douloureux. Alors quand j'ai découvert que ma meilleure amie était devenue complètement accroc à l'héroïne ce fameux soir, j'ai bien cru que j'allais tout détruire. Se rendait-elle compte de la merde que c'était pour se sortir de la drogue ? Moi je savais ce que c'était que de souffrir du manque. Ma mère m'avait fait interner dans un centre spécialisé pour que je me fasse désintoxiquer et que mon mental soit suivit. A cette époque là j'étais complètement différent du gars que je peux être aujourd'hui. J'étais quelqu'un d'instable et je ne supportais pas d'avoir perdu la femme que j'aimais. Chaque personne a des raisons différentes pour tomber dans la drogue. J'avais les miennes et Déliah avait les siennes. J'étais surement le seul à pouvoir comprendre ce qu'elle traversait en ce moment même. Les semaines à venir seront très difficiles pour Déliah. Ca je le savais par expérience et je me devais d'être présent pour elle. Car affronter un tel mal sans avoir personne pour nous aider est parfaitement impossible. Le sevrage était surement une des pires choses qui puisse exister.

Depuis cette terrible soirée, cela faisait maintenant quatre jours que ma meilleure amie était plongée dans le coma. Quatre jours pendant lesquels je n'avais pas réussi à fermer l'oeil. C'était parfaitement impossible. Comment pourrais-je trouver le sommeil alors que l'état de santé de Déliah est dès plus inquiétant ? Ce fut un véritable choc lorsque j'ai su qu'elle devait être sous dialyses à cause de son insuffisance rénale. Entre deux patients et quasiment toutes les heures depuis quatre jours, je venais la voir afin de constater une quelconque amélioration. Mais il n'y avait rien, que dalle. Et ca me frustrait carrément. Même si Déliah était endormie et que je n'étais même pas certain qu'elle m'entende, je lui parlais le temps de lui changer ses perfusions et de lui faire ses examens habituels. Si il y a bien quelque chose que je ne voulais pas, c'était qu'elle soit seule. Car même si elle était dans le coma, je voulais qu'elle ressente une présence. Ma présence. Au début le médecin qui se chargeait d'elle, ne voulait pas que je m'occupe de son cas. Il disait que c'était mauvais pour moi de m'occuper d'une personne dont j'étais si proche. Que ca nuirait à mon travail d'infirmier. Alors j'avais poussé une gueulante et ce cher médecin avait fini par céder. Depuis quatre jours j'étais infecte avec tout le monde. Mes collègues s'en prenaient plein la gueule et certains patients qui s'avéraient être trop chiants avaient le droit à leurs quatre vérités. Mon supérieur m'avait alors ordonné de rentrer chez moi afin de me reposer, de changer d'air. Mais j'avais aussitôt refusé. J'avais déjà perdu un être cher dans un hopital, et je ne permettrais pas que cela se reproduise une nouvelle fois. Déliah ne pouvait pas me laisser tomber de cette façon là.

« Tu as mal là ? » je demande à une petite fille d'environ six ans qui est arrivée ici après une chute dans les escaliers de sa maison. La tête blonde me fait oui de la tête et je pousse un soupire avant de me redresser. Je porte mon attention vers la mère et croise les bras. « Ce n'est rien de très grave, juste une foulure au poignet. Elle a eu beaucoup de chance de ne pas s'être cassée quoi que ce soit. Votre fille s'en tire plutôt bien. » Le visage de la mère se décontracte et elle me gratifie d'un sourire. Je lui prescrit des anti-inflammatoires et la prie d'aller voir mon supérieur qui est un peu plus loin. Ce n'est pas que j'ai envie de me débarrasser d'elles, mais il est l'heure que j'aille voir Déliah. Je passe une main dans mes cheveux qui sont actuellement un vrai foutoir et cligne plusieurs fois des yeux, la fatigue se faisant de plus en plus ressentir. Je me dirige alors vers l'accueil et prend le dossier médical de Déliah avant de me diriger vers sa chambre. En quelques minutes j'arrive à destination et ouvre d'un geste rapide la porte. Je reste figé quelques secondes lorsque je vois ma meilleure amie à genoux et en appuie contre le lit. Je me précipite alors vers elle et envoie valser au passage son dossier médicale sur une chaise juste à côté. « Liah ! Mais qu'est-ce que tu fais hors de ton lit ?! Et depuis quand tu es réveillée ?! » je m'exclame en l'attrapant par la taille et en l'aidant à se relever. « Retourne immédiatement te coucher ! » Je lui ordonne. De toute façon elle n'est pas en état de lutter contre moi. Je la soulève façon « mariée » et la repose sur le matelas avant de remonter ses couvertures. Je fronce les sourcils en constatant qu'elle a arraché ses perfusions. « C'est pas malin d'avoir fait ca...Ca risque de faire un peu mal. » Je lui dit avant d'enfoncer une nouvelle fois les aiguille dans ses bras. « Ne me refais jamais un truc pareil. » Dis-je sur le même ton qu'il y a quelques secondes. Je pousse un soupire. « Excuse-moi...J'voulais pas te parler comme ca. Mais j'ai eu vraiment peur pour toi tu sais... » Je reprends en me pinçant la lèvre inférieure. Je me penche vers elle et dépose un baiser sur son front. « Content de te revoir parmi les vivants. » Dis-je avec un petit sourire. « Je vais t'examiner. » Je ne sais pas si la fatigue fait dérailler ma mémoire, mais j'ai complètement zappé que son dossier médical se trouve sur la chaise juste à coté. Croyant que celui-ci se trouve sur le lit j'attrape alors la pochette et me rend rapidement compte qu'il ne s'agit pas de son dossier mais plutôt d'une décharge concernant la non-réanimation. Je bloque quelques secondes, tournant les pages rapidement. « Qu'est-ce que... »