L'air s'était soudainement rafraîchi. Le soleil disparaissait derrière les arbres rougis de l'automne. Le ciel perdait ses couleurs lumineuses, laissant place à un pourpre maculé de nuages roses. Un tableau digne des plus grands, peignant avec romantisme, la fin d'une nouvelle journée ensoleillée.
J'avançais, à travers ce décor idyllique, sans même me préoccuper du monde autour. Mon monde à moi s'était écroulé quelques heures plus tôt, sans que je ne l'ai vu venir.
Je marchais, cherchant à fuir cette luminosité aveuglante, cachant mes yeux rougis derrière cette capuche tombante. Je marchais au rythme des violons et des guitares sortant de mon IPod, crachés par un casque trop lourd recouvrant mon crâne.
Nombre d'étudiants passaient de ça, de là, ne me voyant pas, m'ignorant, comme je le voulais. Être invisible, voilà bien ce qu'il me fallait à cet instant précis ; Dès demain, ma page Formspring et mon Facebook seraient emplis de messages de pitié ou de moquerie de la part des uns et des autres. Je le savais, mais je ne voulais pas me l'avouer.
La pénombre avait peu à peu recouvert le campus. J'étais seule. J'arrivai à une étendue d'herbe noircie par les couleurs de la nuit, et sans doute encore humide suite à l'arrosage automatique. Mais cela m'était égal. Je traversai la pelouse, et m'y assis une centaine de mètres plus loin. Pourquoi étais-je là ? Je ne savais pas réellement. Une simple envie de respirer, de me tenir à l'écart de cette foule grandissante, de part et d'autre de l'université.
Je repensai à la journée qui venait de s'achever. Jamais je n'aurais imaginé qu'elle puisse être si éprouvante, si difficile ; Celui que j'avais aimé, celui à qui j'avais pardonné toutes ses erreurs, celui qui avait comblé mon coeur et mon être au cours de ces deux dernières années m'avait subitement abandonnée. Pourquoi ? Qu'étais-je à ses yeux ? M'avait-il aimé ne serait-ce qu'une minute ? Toutes ces questions se bousculaient dans ma tête. Jamais je n'avais ressenti pareille souffrance, pareille humiliation. pas le moindre mot, pas la moindre explication, pas même un simple « au revoir ». Seulement une absence, et un nouvel être à combler. Plus jamais je ne veux souffrir ainsi ! Qu'ai-je fais pour obtenir un tel châtiment ?
Mon chagrin se mêlait peu à peu à de la haine et à de l'incompréhension. Je croyais au karma. C'est pourquoi je ne pouvais comprendre ce qu'il m'était arrivé.
Alors que je croyais mon corps vidé de toute son eau, quelques larmes chaudes vinrent piquer mes yeux de leur sel, et s'écoulèrent le long de mes joues. J'avais froid, mais mon corps bouillait de l'intérieur. Je n'aurais su dire si j'en voulais à Joey ou si j'en voulais à une entité supérieure à la race humaine. Ce que je savais, c'est que mon âme était en deuil, que mon univers était aux obsèques de mon coeur.

ok by Alexis