Je me suis levé tôt ce matin, hanté par des cauchemars que je n'ai pas faits depuis des mois... Ils se sont arrêtés en même temps qu'à commencer ma relation avec Lexia, ou presque. Pourquoi reviennent-ils aujourd'hui ? Je regarde à côté de moi, personne... La demoiselle est allée dormir chez son père, cela fait des lustres qu'elle ne l'a pas fait et il lui manque. Elle et moi n'entretenons pas du tout la même relation avec nos paternels. Elle l'adore et je déteste le mien mais nos histoires ne sont pas les même. En effet, elle a eu la plus tendre des enfances avec lui alors que moi j'ai dû subir les coups de cet homme. C'était d'ailleurs lui qui venait parasité mes nuits. Je le voyais en train de tuer ma mère sous ses poings alors que je n'étais encore qu'un enfant. Il se tournait ensuite vers moi et me finissait à mon tour. Cela faisait longtemps qu'il était mort à présent mais je ne pouvais pas retirer ces images de mon esprit... Louanne a accouché il y a quelques jours et Lexia est enceinte à son tour. Cette dernière est persuadée que je serais un merveilleux père mais rien n'est moins sûr que ça. J'en ai l'envie, là n'est pas le problème... J'ai aussi envie d'être aussi connu et doué que Mick Jagger, pourtant je ne le suis pas... J’ai des doutes pleins l’esprit mais je me montre fort parce qu’elle aussi n’a pas connu une enfance normale et qu’elle ne veux pas d’enfant. Je suis le plus heureux des hommes, j’ai une femme qui m’aime et qui attends notre enfant. Ma mère est ravie. Mais je ne sais pas, il y a quelque chose d’étrange en moi parfois. J’ai l’impression d’être vide à cause de cette absence de père… J’essaye de tirer toutes ces pensées de mon esprit pour me lever. J’ai besoin de sortir, de penser à autres choses, de voir du monde… Je me suis dit que pour commencer une bonne douche me ferait du bien.

Je referme la porte derrière Spooky qui la gratte pendant quelques secondes. On dirait qu’il ne veut pas que je le laisse avec Tristan, pire que sa maîtresse dit donc. Je ne prête pourtant pas attention à ses plaintes et démarre ma voiture quelques minute plus tard. Je ne sais pas où aller, je ne sais pas quoi faire. J’ai promis à Lexia qu’elle pourrait passer la journée avec son père. Mathias refuse toujours de me voir, Elixir travaille, ma mère donne un tas d’interview. Il me reste bien Edward. Je sors mon cellulaire à un feu rouge pour lui téléphoner. Messagerie. Il doit être en train de décuver ou quelque chose dans le genre. Je soupire longuement avant de reprendre la route. Je me souviens que je n’ai pas déjeuné, les bruits de mon estomac couvrent bientôt celui de la rue. Je démarre le lecteur CD laissant ainsi la voix de Mick Jagger remplir l’habitacle. Je gagne le nord de la ville, loin de la maison. J’y connais une pâtisserie qui vend des petites merveilles. Un simple croissant avec un bon café fera l’affaire. Je m’assoies à la terrasse et attends. Ce que j’attends ? Je l’ignore moi-même… Je regarde le nom de la rue où je suis. Je réalise soudain que le cimetière où est enterré mon père n’est qu’à quelques rues. Je n’y suis jamais allé, à part le jour de son enterrement et c’est ma mère qui m’a forcé. Pourquoi tout me ramène à lui ce matin ? Je ferme les yeux, paye un autre café et décide de faire un tour dans les rues.

Je passe devant un fleuriste et aperçois à quelques pas l’entrée du cimetière. Je prends un bouquet de fleur à quelques euros avant d’avancer. Il ne me reste que trois pas à faire pour entrer, mais au dernier moment je rebrousse chemin, trouvant cela ridicule. Il ne m’a jamais aimé alors pourquoi je devrais aller le voir ? Je n’étais personne pour lui. Je me demande même si un jour il avait été heureux d'avoir un fils. Tout était assez difficile dans mon enfance. J'avais l'impression d'être une erreur et non pas un enfant de désir et d'amour. Ce n'était pas le cas et même si c'était difficile à admettre, il fallait que je vive avec.
J'étais à présent à quelques mètres de l'entrée. Il y avait un Starbucks. Un frapuccino ne me ferait pas de mal après tout. Je commençais à devenir de plus en plus accro à la caféine décidément; j'avais toujours ses fleurs à la main. Qu'est-ce j'allais pouvoir en faire ? Ce n'était pas le genre de fleurs qu'on offre à sa fiancé ou à sa mère. Il est clair que c'était des fleurs destinées à une tombe. Après avoir fini mon café à l'intérieur du café, j'étais arrivé à me convaincre d'aller dans ce lieu lugubre, plein de tombes, d'os et de verres. Je n'aimais pas trainer dans ce genre de lieu qui symbolisait la mort. J'en avais peur, je savais qu'un jour ou l'autre j'allais mourir. Ce qui se passerait ensuite ? Le trou noir.

Je marchais doucement. Il ne me fallut pas longtemps pour trouver la pierre tombale que je cherchais. « Axel MacNeil, mari et père aimé, mort en servant sa patrie. » Quelle connerie. Toutes les pierres étaient marquées de la même façon de toute façon. Je jetais presque le bouquet pour m'en débarrasser. Pourquoi étais-je là déjà ? Je soupirais un moment avant de m'asseoir sur un coin de la pierre.

« C'est moi... Pa... Papa... Je sais pas ce que je fous là, j'sais que toi non plus. Je suis jamais venu te voir en huit ans alors... C'est tellement idiot de parler à une pierre. T'es mort c'est tout. Tu fais parti du passé et j'aime pas me rappeler celui-ci. Tu te souviens quand tu me frappais ? J'espère que t'es en enfer pour ça. Pour toutes les années terribles qu'on a vécu avec maman, pour toutes les larmes qu'elle a versé à cause de toi. Tu l'aimais vraiment ? Je pense pas. Regarde, j'aime Lexia et je ne la frappe pas. On va aussi avoir un enfant, encore six mois à attendre. Je me suis fait une promesse ne jamais devenir comme toi. Je ne veux pas qu'il est mon enfance, je ne veux pas qu'il ai à mentir pour cacher les bleus, je ne veux pas qu'il est peur en rentrant à la maison tous les soirs. Je ne sais pas pourquoi tu étais comme ça. Tes parents ne t'avaient pas fait subir une telle vie. Tout le monde me disait que quand tu serais mort, j'arriverais à te pardonner tes erreurs mais ça n'a rien changé. Je t'en veux toujours autant. T'as fait tellement de conneries. T'es un monstre. Je voulais te le dire une dernières fois, t'es le pire monstre que j'ai jamais connu de ma vie, tu me dégoûtes j'espère que tu le sais. Je suis pas venu ici pour te demander si t'étais fier de moi comme le font la plupart des gens. Je sais que tu ne l'ai pas, je sais que même si j'étais devenu militaire comme toi, tu ne serais pas fier de moi. T'es qu'un con. Comment maman a pu ressentir quelque chose pour toi ? Comment a-t-elle pu t'aimer ? Je te déteste. Et mon enfant sera quel connard tu étais et pourquoi j'étais si heureux d'apprendre ta mort. Si quelqu'un t'avait pas tué, je l'aurais fait avant. J'espère que tu te fais bien chier là ou t'es et que tu brûles en enfer ou un truc dans le genre. Merci d'être mort si tôt, je n'aurais pas voulu que tu rencontres Lexia et notre enfant... » Je me levais et quittais l'endroit avant de joindre Gabe, pour qu'on aille faire un tour.