Bon je crois que c'est bon, les cartons sont dans le camion et je ... coupée dans son élan, Savannah écarquilla les yeux alors que sa mère se jetait dans ses bras pour la serrer, si bien qu'elle commença à manquer d'air. Euh .. mais .. tu m'écrases... M'man.. On en a déjà parlé, je ne pars plus à l'autre bout du monde je serais pas loin.. tenta-t-elle vainement pour ramener sa génitrice à la raison, les bras levés comme si on la pointait d'une arme. S'il te plaît.. minauda Savannah en grimaçant alors que l'étreinte se resserrait à nouveau arrachant un soupir à la jeune femme qui finit par tapoter le dos de sa mère en signe d'abandon. Elle ne lui avait pas fait de crises de nerfs depuis que les papiers du bail de son nouvel appartement avait été signé, sa fille pouvait donc lui offrir un câlin en signe de drapeau blanc. Ca n'avait jamais été très simple entre elles, Savannah perdait facilement son calme devant les enfantillages de sa mère mais au fond il fallait admettre que ça allait lui manquer de ne plus l'entendre geindre qu'elle voulait des petits enfants, ou qu'elle n'avait plus de rencard et encore tant d'autres raisons de se plaindre. Tu feras attention... conseilla l'ex Mme Julians à sa fille de vingt-sept ans qui roula des yeux avant de lui tapoter la tête et de se défaire de l'étreinte pour quitter l'appartement et rejoindre les déménageurs.
Ils l'attendaient pour signer une décharge et vérifier que le compte des cartons y étaient. Avec un air très sérieux, Savannah vérifia qu'ils fermaient bien l'arrière du camion et les regarda partir alors que son taxi arrivé. Sac à main coincé dans la pliure du coude, elle monta dans le véhicule et ordonna au chauffeur de vite démarrer, sans doute dans l'angoisse que sa timbrée de mère ne décide aussi de faire parti du voyage.

Le coude droit appuyé sur le rebord de la vitre du côté passager, à l'arrière, elle enfonça son poing dans sa joue et regarda le quartier défiler notant dans un coin de sa tête les devantures qui allaient lui manquer. D'accord elle ne partait pas bien loin mais quand même, cela lui faisait un petit quelque chose de quitter son petit stand de magazine où elle s'approvisionnait en lecture people, histoire de savoir les dernières histoires de cœur – et pas que – entre les célébrités.
En y pensant elle sortit un magazine de son sac et entreprit de le feuilleter alors que le taxi ralentissait pour finalement s'arrêter au feu rouge. Par réflexe, Savannah observa la route de son point de vue et sourit au chauffeur qui lui lançait un regard à travers son rétro intérieur. Elle avait laissé sa voiture à sa mère, puisque cette-dernière n'en avait plus depuis qu'elle avait emboutit un mur allez savoir comment, mais ne regrettait pas son geste ; elle faisait parti de ces gens qui appréciaient les transports communs.. Enfin les taxi, parce qu'elle et les bus ou les métros.. C'était pas trop ça.
Et vous partez vivre chez votre petit ami? l'interrogea enfin le chauffeur, arrachant un hoquet de surprise à Savannah qui manqua de s'étouffer en ravalant sa salive. Non.. Non.. non non non.. J'emménage avec une amie et une connaissance à elle.. Enfin j'emménageais parce que finalement elle s'est rabibochée avec son copain alors elle me plante.. et c'était parti pour l'histoire de sa vie, qui sembla passionner le chauffeur qui secouait la tête à chacune des réflexions de la jeune femme. Et donc vous ne connaissez pas l'autre coloc' ? Ca ne vous inquiète pas? reprit l'homme en bifurquant dans la rue où se trouvait l'immeuble devant lequel s'était arrêté le camion. Si je vous dis que j'ai prit une bombe au poivre, vous me prenez pour une folle? demanda-t-elle à son compagnon de route en lui tendant la monnaie. Il rit, elle sourit et l'entendit lui répondre qu'on n'était jamais trop prudent.

Saluant l'homme et son véhicule d'un signe de main, elle ne le regarda pas s'éloigner et se tourna vers les déménageurs qui attendaient ses instructions pour monter ses cartons – principalement remplis de dossier, de post-it et d'électroménager. Par ici, normalement vous pouvez pas vous tromper, la porte est ouverte et devrait y avoir des cartons dans l'entrée non sans suivre le premier déménageur en lui montrant le chemin quand son téléphone se mit à sonner. Laissant le second homme, ou gorille allez savoir, passer Savannah fouilla dans son sac avant d'en sortir son téléphone pour voir le numéro de Christie s'afficher. Oui ? Tu veux m'annoncer quoi ? Que l'immeuble est construit sur une faille sismique? souffla-t-elle dans l'appareil alors qu'elle pointait du doigt le couloir aux deux hommes qui la dévisageaient un peu bizarrement. Oh arrête de geindre. Je n'arrive pas à joindre No' donc je suppose qu'il doit déballer ses affaires ou alors qu'il est mort ensevelis.. ce qu'espérait secrètement Savannah puisque cela lui aurait permis d'échapper à la colocation avec un inconnu. Je voulais lui annoncer du coup mais comme il décroche pas, faudra que tu lui expliques. J'essaierais de rappeler dans la soirée pour savoir si vous vous êtes pas entre-tuer ou que sais-je. ce qui arracha un rire jaune à la jeune femme qui invita les deux types à frapper à la porte pour entrer. Une voix les invita à le faire et elle les laissa déposer deux de ses cartons pour repartir vers le camion chercher les autres. Bon je suis à l'appartement. Je lui dis comment ? Salut Christie a décidé de nous abandonner, on est seul. Au fait je ne suis pas cannibale n'est crainte? tenta vainement Savannah dans l'espoir de se détendre elle-même avant de rencontrer l'individu qu'elle vit émerger de l'étage, une main tendue vers elle. Sa.. commença le jeune homme, qu'elle n'eut pas beaucoup de mal à remettre, lut.. finit-elle, le téléphone toujours à l'oreille d'où elle pouvait distinguer des allô? Allô? répétitif. Comme elle se trouvait encore dans le passage, dans l'entrée, l'un des déménageurs qui revenait avec un carton la bouscula légèrement et elle se heurta à son vis-à-vis pour rebondir et se redresser brutalement, sans lâcher son portable comme si il pouvait la sortir de ce traquenard.

Noah Marshall. En chair et en os, face à elle avec une tête de déterré. Celui dont elle avait brisé la réputation avec son témoignage, celui aussi avec qui elle avait flirté quelques heures un soir. Awkward. Really. La voix de Christie qu'on entendait encore s'échapper de l'appareil, bien que le son était étouffé puisque Savannah avait collé l'objet contre sa clavicule, servait à combler le silence pesant. Même les deux types qui vidaient leur camion semblaient se déplacer sur la pointe des pieds, de peur que ces deux-là explosent et ne fassent tout péter. C'est une blague? tenta-t-elle plus pour elle-même que pour lancer un débat avant de reprendre son téléphone euh.. je te rappelle.. et de couper la communication pour le remettre dans son sac, sauf qu'elle manqua son coup et l'innocent portable retomba sur le sol. Je crois qu'il va me falloir plus qu'une bombe au poivre marmonna-t-elle, légèrement à l'ouest.

ok by Dylan