C’était dimanche, il était dix heures et demi du matin et j’étais scotchée derrière mon bureau à faire de la paperasse pour mon futur cabinet d’avocat. J’avais déjà acheté le local et prévu de quoi le meubler, il ne me restait plus qu’à trouver du personnel et à faire de la pub en croisant les doigts pour que les clients y ramènent leurs fesses. En attendant, j’étais seule à tout gérer et j’étais loin de m’en plaindre. La plupart des gens me prennent pour une garce qui prend tout le monde de haut et ils ont raison. En revanche, ils ont tort sur un point : ils pensent tous que je suis juste bonne à me plaindre sans lever le petit doigt pour faire quoi que ce soit. Et là, ils se mettent le doigt dans l’œil ! Car, je suis une bosseuse acharnée et je suis prête à tous les sacrifices pour obtenir ce dont je désire même si je dois en payer de ma personne. Ainsi, j’étais levée depuis cinq heures du matin et je ne m’étais pas tournée les pouces un seul instant. Après m’être vêtue d’une chemise blanche et d’un tregging noir, je m’étais attelée à la dure tâche d’archiver dans de gros classeurs toutes les factures relatives au cabinet. Cela m’avait pris un temps monstre et m’avait ennuyé au plus au point. Cependant, c’était un mal nécessaire. Ensuite, j’avais commencé à faire le tri des propositions d’embauches et à appeler les personnes au fur et à mesure pour fixer des rendez-vous. A présent, je devais me rendre à la banque et j’avais rendez-vous dans deux heures avec un avocat californien réputé qui souhaitait travailler pour moi. Bref, je n’avais pas de temps à perdre. Je me levai donc et rangeai à la va-vite les feuilles, classeurs et autres objets encombrant mon bureau. Une fois chose faite, je me rendis à ma salle de bain et m’examinai dans le miroir. J’avais une tête à faire peur, n’ayant pas eu de vraies nuits de sommeil depuis une semaine environ. Je m’attelai donc à la dure tâche de camoufler les cernes sous mes yeux et à me donner un autre air que celui d’un cadavre. J’avais à peu près rattraper le coup mais l’on pouvait facilement se rendre compte de ma mine fatiguée si l’on y regardait de plus près. Qu’à cela ne tienne ! Je m’emparai d’une paire de grosse lunette de soleil et en couvrit mes yeux. Ensuite, je pris une thermos dans la cuisine que je remplis de café. Depuis quelque temps, je ne carburais qu’à cela. Du café, du café et encore du café. Je savais pertinemment que ce n’était pas bon pour la santé consommé avec excès mais je n’avais pas vraiment le choix si je voulais tenir durant mes journées de folies. Du coup, je veillais à avoir toujours à disposition du café chaud et bien fort. Après m’être vêtue d’une veste de tailleur noire et avoir pris mon gros sac à main en cuir, je quittai ma villa et essayai de fermer la porte à clé, les bras chargés de dossiers et la thermos en équilibre précaire installée dessus. Je réussis le miracle d’arriver à ma Bentley sans avoir renversé une seule goutte de café et je mis toutes mes affaires du côté passager. C’était une belle journée ensoleillée et j’allais encore une fois devoir m’enfermer dans des bureaux. Alors que je regardai en face, je remarquai une jeune femme qui me fixait avec bien du mal, étant donné qu’elle était éblouie par le soleil. Vu que j’avais toujours mes lunettes de soleil sur mon nez, je n’eus aucun mal à la reconnaître et sortis d’un bond de ma voiture. C’était cette lâche de Kaelyn qui m’avait laissé en plan au lycée, après que la rumeur me concernant ait circulé. Et dire qu’on était les meilleures amies du monde auparavant ! Je traversai d’un pas énergique la rue qui nous séparait et arrivai à sa hauteur. « Tiens tiens, regardez qui voilà ! Ne serait-ce pas cette lâcheuse de Kaelyn, celle qui n’a même pas le cran d’épauler sa meilleure amie qui vit une situation difficile ? Mais non, je ne rêves pas, c’est bien elle ! », m’exclamai-je en lui adressant un grand sourire bien hypocrite.

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