Les flocons s'amoncelaient par milliers dans les Rues de la ville. Les gens, transis de froid depuis des jours et des jours, ne prenaient même plus la peine de sortir s'amuser dans la neige. Ils restaient cloitrés chez eux, en famille, entre eux, sans sortir. Sans échanger même un regard avec les autres, le monde extérieur, qui les enveloppait cependant. Restant fichés dans leur bulle sans se soucier du bonheur ou malheur des autres autour. Les rues étaient toutes enveloppées d'un manteau blanc et pur, et le silence semblait avoir plongé la ville dans un semi sommeil plutôt inquiétant. Dans une chambre, d'un appartement, pourtant, l'eau venait d'être coupée par la main experte d'un homme. Sur le miroir, la condensation était importante. D'un geste, le Mâle laissa son reflet apparaître en face de lui. Il croisa son propre regard, se jaugea lui même, et ses sourcils se froncèrent. Ce qu'il voyait était mauvais, moche. Ca lui donnait la nausée, de se regarder ainsi. Nu comme un ver, devant sa glace, il se regardait, lui, monstrueux, malgré ce que tous disaient. Sa carapace était certes attirante, pour ne pas dire plus, mais en lui, son coeur, lui était d'une crasse sans pareille. Ame impie, il avait honte de ce qu'il était. De ce qu'elle lui avait volé.

Ses longues mains puissantes étaient posées sur le rebord du lavabo. Juché ainsi au dessus de ce dernier, il se toisait, se lorgnait, se détestait. La bile monta à sa gorge, un peu plus et il aurait craché sur ce reflet de lui qu'il reniait. Un homme trop faible, trop gentil, trop naïf. Trop facilement malléable et trahissable. Serrant le rebord du lavabo, ses jointures se blanchirent sous l'effet de la pression, ses avant bras tressaillirent. Mais qu'était il en train de faire ? Pourquoi se préparait il ? Ou allait il réellement ? Pourquoi obéir à cette stupide missive qui ne lui apporterait que des problèmes ? Cette soirée serait sans doute ennuyante à souhait. Pourquoi se casser la tête à se préparer, se pomponner, pour une femme sûrement écervelée, comme celles dont regorgeait le lycée ?

Parce que le nom l'attirait. Quelque chose qui n'avait rien de Parisien en découlait. S'il pouvait trouver quelqu'un qui comme lui, était étranger à Paris de naissance, pourquoi pas ? Et puis, que ferait il d'autre de sa soirée ? Sans doute resterait il avachi dans le canapé à se regarder des dvd. Pas très ragoutant, donc. Alors, lentement, il lâcha le rebord du lavabo, inspira profondément, et alla s'habiller. Son costume était très chic, sorti d'une garde robe très classe qu'il n'osait que rarement utiliser. Il se disait que c'était l'occasion. Dans un soupir, il réajusta son col, et coiffa consciencieusement ses cheveux avec de la laque. Puis, il s'empara de la lettre d'invitation, et sortit de chez lui. Il avait fait falsifier son permis par ses parents, de sorte qu'il puisse conduire alors qu'il n'était qu'à trois mois de la majorité. Héritage de son grand père fortuné, ses parents lui avaient offert une splendide voiture. La Lamborghini Reventon était une merveille à l'oeil et à conduire. Une vraie panthère qui se glissait n'importe où en souplesse.

Chris s'installa dans le bolide en soupirant. Il se rappellait encore la tête des gens quand il passait. Depuis deux mois que son grand père était mort, et qu'il avait hérité d'une ©fortune sans pareille, les gens semblaient avoir un intéret soudain pour lui. Même Clara lui avait laissé un texto, pour lui demander s'ils pouvaient se revoir. Devant l'objet de ses chimères, il n'avait pourtant pas cédé. Et le voila libéré d'elle, roulant à allure modérée dans une ville enfouie dans la neige depuis plusieurs jours. Les flocons effleuraient à peine la carrosserie, sans oser s'y déposer. Elle brillait d'un éclat mortel et dangereux qui inspirait le respect. Chris aimait beaucoup sa voiure. Elle émettait un ronronnement doux quand il mettait le contact.

Lentement, il se dirigea vers le lieu de rendez vous. Devant la fac de la jeune femme, le Panthéon. Lorsqu'il y arriva, il ne vit qu'une seule personne, attendant près d'un réverbère, sur le trottoir. Un long manteau la cachait en grande partie. Mais elle paraissait de fine corpulence. Il stationna la voiture près du trottoir, et soupira bruyamment. Maintenant, fallait faire bonne figure. Elle voulait surement pas passer la soirée avec un zombie. Il s'extirpa du véhicule et en fit le tour, avec agilité et souplesse, et arriva auprès de la femme sans encombre. Là, il tendit la main, et lui happa la main avec douceur, avant d'y déposer un baiser galant.

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