Noah avait été assez etonné de constater que même au Japon, patrie des travailleurs acharnés et de l'extremisme -quoi, comment ça il pouvait parler- et bien oui, il y avait tout de même des journées entières dédiées au glandage dans les règles de l'art.
Officiellement, c'était plutôt une journée de repos et d'instruction par ses propres moyens ainsi que de révisions et travail des acquis de la semaine, mais bon, comme le disait la phrase nullement célèbre puisque inventée de toutes pièces; "libre est l'homme dans son interprétation de la vérité".
Et sa vérité à lui était du genre contemplative, pour ne pas dire paresseuse. Du moins aujourd'hui.
Sa paresse était lève-tôt ... ou plutôt pas encore couchée. Il avait passé la nuit à demi allongé sur son lit à lire ce qui lui tombait sous la main, entre deux efforts surhumains pour se trainer à la fenêtre et fumer quatre ou cing clopes d'affilée, le tout sans réveiller ses collocataires endormis bien sûr.
Il voulait changer de chambre. Une pour lui tout seul et orientée au sud-ouest pour ne pas être réveillé par le soleil le matin s'il oubliait de tirer les rideaux, quelle belle perspective.

Les mains dans les poches de son pantalon un peu large, il dépassa la vitrine d'une boulangerie se voulant française et dont l'enseigne se déclinait dans ... une langue pour le moins inventive. Un sourire s'étira sur ses lèvres palies par le froid mordant du matin, un peu moqueur, un peu navré, sûrement très agaçant au demeurant pour quelqu'un d'extérieur à la scène.
Il portait une de ses chemises favorites, blanche, manches courtes et cintrée, celle qui le rendait oh-so-gay selon Manuel, le type le mieux placé au monde pour faire ce genre de réflexion, soit-dit en pasant. Ils l'avaient acheté ensemble, lui cette chemise, et Mani un froc tellement moulant que c'était à se demander comment il pouvait vraiment rentrer dedans, et pire, en ressortir. Un des grands mystères de l'humanité si vous vouliez son avis.
Et par dessus son col au dernier bouton negligement ouvert -ou pas fermé- la sacro-sainte cravate. Fine et noire, pas celle de son uniforme japonais. Il la tenait de son lycée à New York, petit souvenir avant de partir de la part de Manuel, justement.
Avant de partir, Noah avait rendu son uniforme à l'administration, et Mani, qui portait le siens quand ça lui chantait lui avait refilé sa cravate d'autorité.
"Quand je leur rendrais l'année prochaine, je leur dirais que mon chien l'a bouffée ... ils iront pas vérifier" avait rigolé le portoricain.
Le chien de Manuel -de Tito en fait- s'appelait Spike et était un espèce de croisement accablant entre un rottweiler et un doberman. Un truc qu'on a pas trop envie d'approcher en somme.

Noah commençait à regretter de n'avoir rien prit d'autre à se mettre sur le dos, mais il faisait front, tel le puissant et courageux guerrier face aux affres de ... non, il caillait vachement quand même, c'était inadmissible.
En plus il risquait d'attraper la mort, ce qui serait des plus cocasses puisqu'il longeait désormais le cimetière de la ville. Certains emplacements étaient plus grands que d'autres. Un cimetière envahi d'américains, les japonais préfèraient faire cramer leurs morts pour gagner de la place. Et les américains, en bons chrétiens vainqueur de la guerre, préféraient réquisitionner la dite place pour y enterrer leurs morts patriotiques.
Allez, il allait faire lui aussi acte de patriotisme et saluer les tombes de ses ancêtres. Même s'il était anglais.

Il poussa la grille gelée d'une main -qu'il rangea aussitôt apres de nouveau dans sa poche- et s'avança doucement dans les allées, profitant du soleil aux couleurs chatoyantes qui lui rechauffait un peu les joues.
Comme toujours, il y avait le petit temple tout au fond, peint de rouge et de noir, lieu de prière et cabine d'essayage pour revêtir le costume traditionnel. Une silhouette était allongée sur la plus haute marche.
Noah rigola doucement en imaginant le blasphème. Mais non, les japonais sont des gens pacifiques, et tolérants ... envers les étrangers qui ignorent tout des bonnes manières. C'est pas de leur faute, ils sont étrangers, les pauvres.

Il fronça les sourcils en reconnaissant son pion rebelle, celui qui avait foutu sa partie d'échecs en l'air, l'enfoiré. lentement, il monta les marche pour se retrouver juste à côté du corps étendu, le suplombant de manière à le priver de son soleil rassurant.
Et s'il lui collait sa pompe dans la gueule pour voir ? Non, trop direct comme approche, il allait se contenter de ...

Noah se baissa doucement à hauteur de Lochlan, une main sur ses cuisses tandis que l'autre attrapait la sucette de l'irlandais pour lui ôter résolument de la bouche.
Heureusement qu'il s'était dit "pas de prochaine fois", tiens.

"- Vous êtes sur mon passage ...", souffla-t-il en anglais, avec un demi sourire vaguement dédaigneux, quoiqu'un peu trop amusé pour être honnête.

Code Ok edit By Timmy ... le code le plus fourbe de toute l'humanité, et même des dinosaures (avant l'humanité, donc) soit dit en passant