Apparence et style : Je ne me suis jamais concentrée un instant sur le détail de mon physique, je n'y porte aucune importance particulière - je n'ai rien de surprenant, si ce n'est quelques fiertés. Pour être honnête, je ressemble à ma mère - et il n'y a pas de raison de se réjouir. Ma mère est une femme simple, qui revendique chaque fantaisie, autant des bijoux que des robes. Elle met un point d'honneur à l'esprit pratique plutôt qu'à l'esthétique. J'ai - à quelques détails près - le même fonctionnement. Je n'ai qu'un voire deux ensembles vestimentaires pour le travail et trois ensembles pour le quotidien, dont un survêtement. Je ne me la joue jamais, je ne sors que très rarement le grand jeu, ce jeu qui soi-disant, séduit les yeux. Malgré tout, je veille à avoir un charme, une élégance. Toujours comme ma mère. Dans tout cela, mon père ne m'a donnée physiquement que son côté enfantin. Il est gamin, immature - et je n'ai pas honte de l'avouer, à quoi bon. Il arbore sans concession bon nombre de broutilles, allant de la simple bague à la plus modeste cravate comme l'on ne n'en fait plus - fleurie, violette. C'est son yin. De mon côté, je rajoute souvent une barette en forme de papillon dans mes cheveux, ou je mets à mon poignet un bracelet se rapportant à disney. Je suis - comme mon père - charmée par les goûts des enfants, l'innoncence de cet âge, la mode de cette période. Si je devais me décrire plus simplement, plus justement que ce que je viens de faire, je me contenterais de donner ma taille, mon poids, ma pointure, la couleur de mes cheveux et toute futilité que beaucoup s'obstinent à faire. Mais je ne le ferais pas, parce que ça change - pour la plupart de ces critères - un peu plus chaque jour. Mes cheveux deviennent de plus en plus long ou se raccourcissent si je fais un bref passage chez le coiffeur. À la base bruns, il m'arrive de les colorer - des mèches, seulement. Mes yeux intensifient leur éclat l'été, s'obscurcissent l'hiver - soit ils sont marrons, soit ils sont marron clair. Qu'importe, me diriez-vous, c'est la même chose, à un mot près. Sauf que c'est votre avis. S'il y a bien une chose, une partie de mon corps qui mérite d'être décrite, ce n'est autre que mon nez. Mon nez presque aquilin - pourtant suis-je démunie de toute origine grecque. Mon nez droit, parfaitement centré sur mon visage. Mon nez que je tiens de ma grand-mère - grand-mère que je considérais comme mère. Je lui accorde une valeur sentimentale, rien que par ce fait, par cette origine. Il a sauté une génération, je suis la seule à en avoir bénéficiée. Je suis la seule à en être l'héritière, si j'ose dire. Et ma bouche, au milieu de tout ça, n'est qu'une tâche en-dessous de ce nez si parfait. Une tâche qui me sert néanmois beaucoup et pour laquelle je ne devrais pas avoir cette réaction. Pourtant, je ne puis m'empêcher de penser qu'elle n'aurait pas dû être là, à quelques millimètres seulement de ma fierté, de cette fierté que j'essaie de dissimuler, pour ne pas me vanter, pour ne pas me creuser mauvaise réputation dans la société parce qu'untel me trouve, comment dirions-nous, narcissique. Une autre de mes fiertés serait sans doute mes mains, si souples. Je n'ai jamais eu une crampe à un doigt, je ne me suis jamais tordue une main. Je considère cela comme un don, un cadeau. Rares sont les personnes dans mon cas, qui n'a pas déjà subi une douleur à cause d'une de ses mains ? Mais au-delà de ces fiertés, que je n'ai pas toutes citées, restent ces parties que je voudrais voir partir, s'enlever, ne plus exister, ne plus apparaître sur moi, à commencer par mes pieds, trop grands, trop longs - qui doivent être recouverts par des mocassins, de vieux mocassins en pointure 40, 41. Il y a aussi cette poitrine complètement plate, qui me fait utiliser des sous-vêtements d'enfants - vous savez, ces sous-vêtements aux noeuds papillon sur les côtés, ces sous-vêtements aux princesses disney dessus. Même avec un goût prononcé pour ce monde fragile, ce monde enfantin, sur ce plan-là, je ne peux qu'en avoir honte. Alors je me mets des vestes, je me couvre, que ce soit l'été ou l'hiver. C'est un réel amusement que de me trouver un maillot de bain quand il s'agit d'aller se baigner - imaginez, les vendeuses, quand je viens les voir et que je leur demande de l'aide, pas une n'a pas fait une tête de dix pieds de longs. Malgré tout, je fais avec, je le vis bien et - je crois - que c'est l'essentiel. D'autres femmes - sûrement plus belles - tueraient pour être à ma place. Soit.

Caractère : Je crois que personne n'ose trop se décrire, mentalement j'entends. Peut-être est-ce par peur de dévoiler ses défauts, casser cette image parfaite que l'on se donne tant de mal à fabriquer ou est-ce une question de fierté - si certains imaginent que montrer au grand jour leurs défauts serait acte de représailles quelconques. Pour ma part, je n'en dis rien, je n'ai aucune opinion et c'est sans idée derrière la tête ou blocage que je me porte au jeu. Comme vous l'aurez sans doute remarqué, je suis quelqu'un de réfléchi, philosophique, littéraire : se poser des questions, y donner des réponses - du moins formuler des hypothèses, sont de vrais passe-temps pour moi. Sûrement est-ce aussi cette manie de toujours avoir le dernier mot, de toujours vouloir débattre, qui a provoqué la mort de mon couple il y a quatre mois, à cause d'une énième dispute sur le sujet, ce même sujet que je suis entrain de traiter. Et aussi étrange que cela puisse paraître, ça ne me fait rien, ni chaud ni froid. Je ne ressens aucun regret, aucun remord, aucune pitié, aucun sentiment. Je crois que j'ai peur de montrer ce que je ressens - que ce soit aux autres autant qu'à moi. J'ai peur de connaître mes émotions, mes sentiments - et ce n'est pas faute d'être bavarde, complètement délurée. Je ne m'arrête pas de parler - souvent pour un rien. Seules mes pensées sont concrètes. Je ne m'arrête jamais non plus de faire la folle, de faire la conne - sonner aux portes des gens que je ne connais pas et m'enfuir en courant est une action que j'ai faite tellement de fois que je ne compte même plus le nombre exact. Souriante et amusante, je ne me prive jamais d'un plaisir, d'une occasion de profiter de la vie, comme diraient mes anciens camarades de faculté. Mais j'aime à être aussi sérieuse, à avoir des temps pour moi. Dans ces moments-là, je sors le crayon de papier, les feuilles et je dessine. Je dessine ce qui me passe par la tête. Je dessine et je fais le vide. Je dessine et je jette, je dessine et je garde - tout dépend de mon humeur. Quand je garde et quand je suis déterminée à aller au bout de mes rêves, j'expose. J'expose d'ailleurs dans toute sorte de galeries - sauf que ce sont plus généralement des galeries amatrices, les plus professionnelles me fermant les portes. Je n'ai pu pénétrer dans une vraie galerie qu'une fois, à l'occasion du vernissage d'un ami - un grand artiste, qui me considérait à son niveau malgré mes doutes. Je ne sais pas ce qu'il est devenu, cet ami - avec sa carrière, on a perdu contact, bien qu'au début on s'envoyait des lettres. Maintenant, c'est le désert. Mais je garde la tête haute et j'avance, toujours. C'est aussi une partie de mon caractère, de ne pas regarder le passé. Je crois que je le crains, je crains les moments que j'ai vécu avant et je crains aussi l'avenir. Je peux même commencer à croire que je crains le présent. En fait, je crains le temps, tout simplement. Plus il avance, plus je me sens faible, parce que plus je vieillis et plus je me rapproche de ce pas si terrifiant qu'est la mort. Je suis certaine de n'être pas la seule sur cette planète à être épouvantée par cette pensée morbide et avec elle, continuer d'avancer et foncer. Je suis sûre que d'autres ont les mêmes convictions et les mêmes valeurs, je ne les ai seulement pas rencontrés et je ne pourrais peut-être jamais. Je ne fais pas confiance au destin comme je ne fais confiance en personne. Rares sont ceux qui arrivent à obtenir ma confiance et ils ont mis du temps, ils ont mis un temps infini avant d'y arriver, une éternité, comme s'ils avaient vécu déjà trois vies. 300 ans. Toujours est-il que l'on peut dire de moi que je suis une personne fidèle, honnête et généreuse. Au moins que vous sachiez que je ne suis pas sans qualité - ce qui serait, je crois, assez problématique. Romantique incorrigible, je me refuse à faire des pas dans l'amour si mon compagnon de route ne respecte pas ce que je suis, ce que je pense, ce que je sais, ce que je vois et ce que je veux. Je suis difficile, exigeante, compliquée mais je ne changerais rien de ma personne, j'en aurais trop peur. Penser être différente de maintenant, je ne peux pas. J'ai posé une énième barrière. Tant pis, j'en ai pris l'habitude - comme les autres prennent l'habitude de m'avoir sur leur dos. C'est un cap - et pour citer une oeuvre connue, c'est un pic, que dis-je, une péninsule !

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