→ Encore une longue journée à l’université. Beaucoup se seraient plaints de leur fatigue ou même de leur ennui, mais pas Iseult. Ayant toujours été très attirée par les études, le temps qu’elle passait en cours était souvent le meilleur de la journée. Elle avait toujours adoré s’instruire et amplifier sa culture générale. Elle avait dans sa vie un but fixe depuis très longtemps et elle comptait bien s’y tenir, voilà pourquoi il n’y avait pas plus concentré et appliqué qu’elle sur tout le campus. Bon nombre de ses amis – pas aussi nombreux que ça – s’amusaient souvent à se moquer de son humeur noire lorsqu’on osait lui adresser la parole durant les cours, ou de ses remarques incessantes lorsque certaines personnes autour bavardaient durant les explications des professeurs. Mais c’était plus fort qu’elle, elle ne voulait tout simplement pas perdre de temps, voulait avoir son diplôme au plus vite. Cependant, aussi concentrée et passionnée qu’elle pouvait être durant les leçons, la fatigue se faisait tout de même fortement ressentir à la sortie. Aimer les cours ne suffit pas à effacer l’épuisement que peut créer une journée entière à l’université. C’est pourquoi, lorsque devant l’université un groupe de sa classe lui proposa de se joindre à eux pour passer une partie de la soirée dans un bar pas loin, elle refusa poliment et parti à pied en direction du bord de l’océan.

Au fil de ses années à San Francisco, c’était devenu comme une habitude. Chaque foi que la journée avait été longue ou que quelque chose la tracassait, c’est au bord de l’océan qu’elle se réfugiait. Le bruit des vagues avait toujours eu un effet apaisant sur son humeur. Assise sur le sable en cette soirée d’octobre, elle se mit soudainement à penser aux côtes de son pays natal, qui en ce moment lui manquait terriblement. Il lui arrivait souvent de rêvasser à son enfance, bercée au rythme des matchs de son père, ou encore à ses entraînements hebdomadaires dans le club féminin de Cardiff. Elle y avait vécu tant de choses, des bonnes comme des mauvaises. Elle y avait connu tant de monde. Son Royaume-Uni adoré. Elle tourna légèrement la tête et ses yeux se posèrent sur une maison qu’elle connaissait aujourd’hui que trop bien. Ses pensées se redirigèrent vers son enfance, vers cette semaine passée à Londres. Son père s’était blessé, elle avait toujours détesté lorsque son père se blessait. C’est pourquoi lorsqu’il lui avait dit qu’il devait se rendre dans la capitale pour se faire opérer, elle avait exiger l’accompagner. Tant pis pour les cours, tant pis pour tout ça, elle ne voulait tout simplement pas se séparer de son père. L’idée seule était tout simplement inconcevable. Et c’est durant ce séjour justement qu’elles s’étaient rencontrées. Deux jeunes gamines de douze ans que tout opposait. L’une élevée dans une famille instruite, l’autre dans une famille où le sport était roi. Deux extrêmes. Et pourtant tout les avait réunies. Une amitié profonde s’était installée entre les deux jeunes filles, malgré leur deux pays différents. Elles réussissaient toujours à s’organiser afin de pouvoir se voir ne serait-ce qu’un jour.

Bianca était en sorte la seule vraie amie d’Iseult à cette époque, cette dernière ayant toujours été bien trop timide pour s’approcher des inconnus. La jeune Williamson avait toujours été, en quelque sorte, son modèle. Elle faisait tout pour lui ressembler, pour essayer de la rendre fière. Certes, à l’époque elle ne s’en était pas rendu compte. À douze ans, on est tout sauf assez mature pour se rendre compte de la nature de ses sentiments. Ce n’est qu’en quittant la Grande-Bretagne pour la côte ouest, tout juste âgée de quinze ans, que peu à peu, elle réalisa. Tout le temps qu’elle passait à penser à la jeune blonde voulait dire bien plus que ce auquel elle avait toujours pensé : on pense souvent à la même personne lorsque l’on a qu’une seule amie, n’est-ce pas ? Cependant, c’était bien plus que ça.

Lorsqu'elle avait entendu le bruit courir que la jeune Williamson s’était installé à San Francisco, elle n’avait pas vraiment voulu y croire, de peur de se faire trop d’illusions quant à de possibles retrouvailles. Puis elle l’avait aperçu, un soir, rentrant chez elle alors qu’elle-même s’apprêtait à quitter la plage et à rentrer chez elle. Depuis, elle passait encore plus de temps que d’habitude sur le sable, chaque jour un peu plus proche de l’habitat de la jeune blonde, sans pour autant s’installer devant la porte. Elle avait toujours espéré voir la porte s’ouvrir. Cependant, jamais elle n’aurait imaginé, ce soir d’octobre après une longue journée, que c’était exactement ce qui allait arriver. Elle laissait rêveusement ses doigts tracer diverses formes dans le sable lorsque le bruit d'une porte s'ouvrant se fit entendre dans son dos. Elle tourna la tête lentement, les yeux légèrement écarquillés. Son regard croisa alors celui de celle qui avait été l'une de ses plus grandes amies, et elle se sentit rougir instantanément. Lentement, elle baissa les yeux, incapable de soutenir le regard d'azur de Bianca plus longtemps. Foutue timidité.
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