→ Le centre commercial. Un endroit immense, bondé de gens, peu importe le moment de l’année. Mais il était vrai que c’était encore plus terrible lors du temps des fêtes et ce n’était guère étonnant. Après tout, les cadeaux, ça s’achetait au centre commercial, dans les boutiques. Et beaucoup étaient souvent en retard, alors ils se ramassaient tous le même jour au centre commercial et l’endroit était envahi à un tel point qu’on ne pouvait faire deux pas sans frôler ou foncer dans une personne. Mais Nathanaël était loin d’être dérangé par tout cela. Il aimait être discret, loin des regards et se fondre dans la foule. Dans une telle foule et vu son habillement tout à fait normal et décontracté, il savait bien que personne n’aurait l’envie de le regarder et jamais il n’aurait toute l’attention sur lui. À moins d’une gaffe. D’une terrible gaffe. Dans le genre, tomber dans un escalier roulant ou échapper tout ses sacs et que tout se renverse sur le sol. Mais le Slovaque n’était pas du genre maladroit, alors il était loin d’être inquiet à ce sujet. Ce fut à ce moment là qu’il s’arrêta devant une certaine boutique dont la baie vitrée projetait son reflet. Ses souliers, des Converses brunes, mais d’un beau brun. Le même que ses iris noisette. Un pantalon un peu serré, noir. Une chemise blanche sous une veste sans manche. Et ses cheveux en bataille, comme à son habitude. Son visage était frais et calme, il avait eut une bonne nuit et s’était bien reposé. Hier soir, ça l’avait bien été la première fois depuis des semaines qu’il n’avait pas ramené une quelconque conquête dans son lit. Ce repos temporaire était intéressant, et magique.

Le jeune Nahov continua son avancée entre les gens. Certains étaient pressés et couraient dans tous les sens, bousculant tout le monde et tout sur leur passage. D’autres étaient calme, semblant prendre une marche de santé. Et puis, il y avait ceux en compagnie de quelqu’un. Des couples, des amis, des groupes de personne. Des noirs, des blancs, des asiatiques. Le centre commercial était le meilleur endroit pour trouver de tout. Autant des couples vieillards que des jeunes enfants. Autant des groupes de personnes noirs que des couples pas de la même origine. Une femme blanche et un homme noir. Il n’était pas raciste, mais il n’arrivait pas à s’imaginer comment se serait être en couple avec une femme noir. De toute manière, il n’arrivait pas à s’imaginer être en couple tout seul. L’amour, ce n’était pas pour lui. Il méprisait ce sentiment que tous bénissaient. Il avait couché avec de nombreuses femmes et hommes de d’autres origines, mais être en couple… c’était quelque chose d’impossible pour lui. Par peur, par haine. Il ne savait plus trop comment il en était venu à renié l’amour et l’exclure du chemin de son avenir. Mais ses amis s’obstinaient à lui répéter la même phrase à chaque fois que le sujet était abordé : « Penses ce que tu veux San, un jour, l’amour te tombera dessus et tu ne l’auras même pas venu venir. » À cela, il répondait toujours d’un humour sarcastique qui exaspérait ses amis : « Évidemment que je ne le verrais pas venir, puisque l’amour, je l’ai renié de ma vie. »

Après plusieurs allées et plusieurs escalier, Nathanaël arriva enfin au banc où il avait donné rendez-vous avec Lubja. Ils se voyaient très souvent et aujourd’hui, ça l’avait été son tour de choisir l’endroit. Le centre commercial. C’était l’endroit parfait. Même s’ils s’embrassaient, même s’ils se touchaient, personne ne s’en formulerait. Le Slovaque balaya les alentours de son regard noisette et repéra six couples qui s’embrassaient passionnément sans que personne ne les regarde vraiment. Enfin, presque personne, puisque lui les avait observés. Assied sur le banc libre de toute personne, devant une certaine boutique, la préférée de la jeune femme, il plongea la main dans sa poche, en retirant son portable. Ils allaient se texter tout le long du chemin qu’elle ferait pour le rejoindre. C’était toujours comme cela. Ils ne pouvaient plus se passer de l’autre depuis leur première fois. Enfin, la sienne encore plus. Ça l’avait été la première fois qu’il avait couché avec elle, évidemment, mais pour elle… ça l’avait été sa première fois tout court. Coincée, timide, elle avait tout d’abord refusée ses avances. Et puis, c’était bien normal. Les premières fois qu’il l’avait demandé au club de strip-tease, il était défoncé. À chaque fois. Et puis, une fois, complètement envoûté par elle, San était venu sobre et complètement normal. Aucune drogue consommée et seulement le verre de vodka qu’il avait commandé au bar d’entamé. Ce soir là, ça l’avait été le bon soir. Il ne savait pas si elle s’était attendue à ce que sa première fois soit dans un film, mais cette première fois fut tout à fait particulière. Dans les toilettes, la porte verrouillée. Mais ça l’avait été divin, comme si c’était sa première fois à lui aussi. Incroyable. Aujourd’hui, ils avaient une relation plus que particulière. Amis. Une relation très physique. Toujours ce besoin de se toucher ou de s’embrasser. Ils n’étaient pas couple, loin de là. Et puis, ils couchaient régulièrement ensemble. Plongé dans ses pensées, Nathanaël en oublia le lieu, les gens, tout autour de lui. Le monde semblait vide comparé à ses pensées. Le regard rivé au sol, un vague sourire discret à ses lèvres, il se remémorait les premiers moments qu’il avait passé avec Lubja. Il avait été idiot au départ, mais ça l’avait valu la peine. Lubja était une jeune femme extraordinaire et il aurait raté quelque chose de ne pas avoir insisté pour coucher avec elle. Il n’avait jamais été la première fois de quelqu’un, puisque sa première fois avait été avec une fille qui avait déjà de l’expérience. Être la première fois de quelqu’un, c’était particulier…

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