→ L'après midi du samedi touchait à sa fin, tandis que les minutes fuyaient lentement les unes après les autres. Le soleil brillait encore, bien que ses rayons somnolaient en attendant l'arrivée de la lune. Un temps chaud et sec enrobait la ville, accompagné d'une brise légère qui rafraichissait les visages. Le ciel était bleu, les oiseaux chantaient, tandis que les quartiers étaient calme. La vie new-yorkaise connaissait une véritable période de paix, temporairement au moins. Ce fut un samedi tout à fait ordinaire. En début de journée, les touristes et autres personnes inutiles se ruèrent dans la 5e avenue pour dévaliser les boutiques, espérant être les premiers servies ; les enfants se levèrent pour regarder tranquillement la télévision, puis sortirent au parc en famille pour pique-niquer ; les artistes s'installèrent à Central Park pour tenter de trouver l'inspiration ; les célibataires durent faire leurs courses de la semaine ; et les plus chanceux partirent à leur pavillon secondaire. Pourtant, Zoé avait eu le cafard toute la journée.

Sortie d'une bonne grâce matinée, elle avait commencé par être de très bonne humeur. Poppy, sa colocataire lui avait même préparé le café. Toutes deux papotèrent jusqu'à midi environ, quand la jeune brune dû s'en aller pour rejoindre son amant potentiel dont elle était folle amoureuse. Zoé dû donc déjeuner seule en tête à tête avec son agenda, qui lui engagea la conversation en lui affirmant qu'elle aurait une après-midi bien chargée. Elle avait le week end pour rédiger une dissertation sur ses motivations à faire de la photographie. La demoiselle ne se découragea pas pour autant. Elle prit d'une main ferme son ordinateur après avoir fait sa vaisselle, puis elle s'installa à son bureau. Pendant qu'elle avait l'esprit clair, une volonté de fer, et toute une journée pour accomplir son devoir, Zoé se retroussa les manches pour s'adonner à sa tâche. Malheureusement pour elle, tout ne fut pas si simple. Impossible d'aligner plus de trois mots, encore moins de remplir les quatre pages qui lui étaient imposées. Elle aimait pourtant ce qu'elle faisait, c'était une passionnée, une vrai ! Depuis qu'elle avait eu son premier appareil photo à l'âge de huit ans, la blondinette n'avait jamais cessé de prendre des clichés. Des visages, des végétaux, des animaux, des paysages, des objets en tout genre, zoomé ou éloigné, elle avait toujours bombardé son entourage de photos.

C'était sa grand-mère qui lui avait appris tout ce qu'elle savait. Cette dernière était une artiste dans l'âme. Elle était d'une patience extraordinaire, d'une grande sagesse, et d'une imagination débordante. Elle avait transmit à sa petite fille l'art de développer ses photos soi-même, à prendre d'une façon les photographies et non d'une autre, à attendre le moment à immortaliser, et à respecter tout ce qui lui servirait de modèle. Zoé avait toujours admiré sa grand-mère pour son savoir, et sa gentillesse. Car même si celle-ci passait beaucoup de temps à son atelier, la grand mère Shakespeare aimait ses petits enfants par-dessus tout. Elle leur donna tout l'amour qu'elle pu, et ce, jusqu'à son dernier souffle. D'ailleurs, c'est à sa chère Zoé qu'elle légat son appareil photo de professionnel, se fut le plus beau cadeau que l'étudiante reçut, car sa valeur sentimental était inestimable. Cela remontait maintenant à trois ans déjà, et l'étudiante était maintenant une jeune femme qui prenait sa vie en main. Mais à quel prix ? Elle avait perdu son frère à cause du déménagement, elle n'avait même pas pu assister à l'enterrement de sa grand-mère qui tomba lors de ses examens de fin d'année, et elle avait pratiquement coupé les ponts avec ses parents qui appartenaient désormais à la haute société américaine.

Alors que sa page restait blanche, Zoé se ressassait de vieux souvenirs. Elle avait tant perdu en venant à New York, et pourtant, elle ne pouvait pas vraiment se plaindre de sa vie actuelle... Elle avait des amis, une colocataire en or, un appartement, d'excellent résultats à l'université, et une bonne humeur communicative. Mais cette après-midi là, tout cela ne sembla point lui suffire. Au lieu de voir des taxis jaunes par la fenêtre, et d'entendre brayer son voisin d'en face, une mélodie anglaise immonde, elle ne désirait qu'une chose, retourner à Paris. Elle aurait tant aimé faire une longue balade sur les quais de la Seine, là où elle croiserait de vieux peintres. Bercée par la langue de Molière, elle se serait quelque peu moquée des touristes perdus, puis elle se serait fait réprimander par son grand-frère, qui lui reprocherait d'être une véritable tête de mule sans cœur. Mais rien de tout cela n'était possible. La France était loin, ses racines aussi, et la jeune femme devrait si faire. Bien qu'après quatre ans à New York, Zoé ne se sentait plus vraiment étrangère à la ville, une mélancolie et une solitude demeuraient dans en elle.

Dix huit heure sonna.

La page blanche avait surpassé le courage de l'étudiante. Totalement démoralisée par l'élan de souvenirs qui l'avait envahis, la jeune blondinette s'affala sur son canapé. Le regard dans le vide, elle pensa à la soirée qui l'attendait, ce qui finit de l'achever. Poppy ne rentrerait que tard dans la nuit, Zoé resterait donc encore seule un sacré bout de temps. Au programme, elle pensa commander une simple pizza, avant de s'effondrer devant la télévision. Puis elle se dit qu'elle ferait peut-être mieux d'aller directement se coucher sans manger, son inspiration reviendrait peut-être durant la nuit. Lasser de tout, elle partie se changer à la salle de bain. C'est alors qu'elle s'aperçut dans le miroir. Elle avait un visage vidé de toutes expressions, ses émeraudes étaient ternes, ses mains moles, et sa posture courbée. Elle écarquilla les yeux de stupeur devant son reflet qui la dégouttait. « Mon Dieu mais tu t'es vu ?! » égosilla t-elle.

Après quelques secondes, elle couru au salon pour prendre son téléphone portable. Elle composa un numéro mais tomba sur le répondeur. Sans se décourager, elle y laissa un message : « Coucou ma puce ! Dis-moi, tu fais quoi se soir ? J'aurai besoin de te voir, parce-que là je fais pitié à voir, c'est affreux. Est-ce que tu peux me rejoindre au Starbucks à 19h s'il-te-plait ? Rappel moi vite. Bisous ma chérie ! » Suite à ça, elle traversa l'appartement, se doucha, se maquilla légèrement, et s'installa devant sa garde robe. Dix minutes s'écoulèrent avant que la jeune femme se décide à s'habiller. Elle opta pour sarouel blanc qui descendait jusqu'au genoux, un corset noir et blanc et une veste de costard. Ses spartiates aux pieds et son sac à main sous le bras, elle sortie en claquant la porte derrière elle, bien décidée à chasser sa mélancolie, et à passer une excellente soirée. * Après, tout, il était désormais trop tard pour revenir en arrière, alors à quoi bon se morfondre. * se rassura t-elle à penser.

→ ok by la junkie.