Ca ne faisait pas longtemps qu’il avait été viré de son appartement par son colocataire et après avoir airé de droit à gauche, il venait enfin de se trouver un petit appart qui, certes ne payait pas de mine, mais au moins il avait un chez lui. Il avait mis de l’argent de côté mais il n’avait pas imaginé un seul instant que les prix seraient aussi exorbitants. Presque tout passa dans la caution, les trois mois de loyer d’avance, et les quelques meubles qu’il s’était offert. Il vivait dans un mini studio de deux pièces avec salle de bain – toilettes séparées, situé dans le Bronx. Le quartier n’était pas le meilleur et la rue dans laquelle il vivait était assez bruyante mais pour le moment il ne pouvait prétendre à mieux. Il avait débarqué les mains dans les poches pour changer d’air et tenter la grande aventure. Une fois les meubles installés, il se décida à déballer ses cartons. Des choses relativement diverses et variées qu’il n’avait pas revu depuis des lustres s’y trouvaient, notamment une chemise hawaïenne qu’il n’avait pas remis depuis le lycée. C’est dans une petite boîte qu’il retrouva quelque chose qui le replongea dans de nombreux souvenirs. C’était une simple photo prise à l’époque de ses seize ans. Il occupait la place du milieu et à ses côtés se trouvaient Tulisa et Flora. A l’époque, c’était un peu les trois mousquetaires puis les choses ont changé. Tous trois vivaient en Grèce, tous trois se connaissaient depuis tout petit et tous trois adoraient trainer ensemble. La Grèce, quel drôle de pays pour un petit parisien. Ses parents étaient français et il passa les quatre premières années de sa vie en France. Il ne garde pas tellement de souvenirs du pays si ce n’est sa langue maternelle. Il était sans doute trop petit pour s’en souvenir. Il se rappelle mieux de la Grèce vu qu’il y a passé la plus grande partie de sa vie. Placé au départ dans une école française, ses parents avaient rapidement revu leur jugement pour le placer dans une école normale : ils tenaient à ce que leur fils parle aussi bien grec que français et à ce qu’il s’intègre et s’habitue à la vie du pays. Il vécu ainsi dans une environnement chaleureux où le soleil brillait presque tous les jours de l’année. Il repensait à toutes ces choses lorsque ses souvenirs firent un bon. Il se souvint du jour où le trio des trois mousquetaires se compliqua. C’était le jour de la fête d’anniversaire de George qui pour marquer le coup de ses seize ans avait invité pratiquement tout le lycée. Etienne ne le connaissait pas particulièrement bien mais il s’était quand même vu invité et ne loupa pas l’occasion de faire la fête. Il se rappela avoir mis un costume pour l’occasion. Quand il y repense, il se dit qu’il devait vraiment avoir l’air d’un pingouin mais l’avantage c’est qu’il se fondait dans le moule étant donné que tout le monde avait voulu faire un effort pour s’habiller chic mais qu’ayant tous entre quinze et dix-huit ans, ils étaient tous aussi moches et ridicules que lui. Entre les bagues, les lunettes et les boutons d’acné, et les looks qui ne ressemblaient à rien, tout le monde était à peu près à égalité ce soir là. Repenser à tout ça le fit sourire. Il s’était tapé la honte de sa vie ce soir là. Dire que les parents de Tulisa les avaient surpris dans le même lit. Il se tapa la tête à ce souvenir. Il faut dire qu’ils avaient trop bu, quelle idée de chercher la réserve d’alcool et de quitter a fête pour se rendre chez la jeune femme. Il avait toujours eu un faible pour elle et lorsqu’elle passa ses mains derrière son cou, il sentit son cœur chaviré et se laissa aller à l’embrasser. C’est comme ça qu’ils se retrouvèrent dans le même lit et c’est comme ça que les parents de Tulisa les surprirent. Il fut viré limite à coup de pieds aux fesses et ce soir là elle vint se réfugier chez lui. Elle dormit dans ses bras après lui avoir raconté toute l’histoire et il resta là à la regarder dormir. C’est peu de temps après qu’il dû lui dire adieu. Elle partit pour retrouver ça sœur à New York. Il l’avait lui-même encouragé dans ce sens mais il ignorait alors qu’elle lui manquerait à ce point. Sur les trois mousquetaires, il n’en resta plus que deux. Repenser à tous ça le mina. Il alla à la cuisine ouvrir le vieux frigo tout pourrit et en sortit une bière histoire de se remonter le moral. La vie à Mikonos avait suivie son cours. Tulisa partie, il restait Flora qui lui avoua qu’elle était depuis longtemps amoureuse de lui. Un peu abasourdi par la nouvelle, il ne sut pas d’emblée comme réagir et fut un peu désappointé. A l’époque, il aurait préféré que Tulisa reste et essayer de construire quelque chose avec elle mais le destin en avait décidé autrement. Malgré tout, il était très attaché à Flora et fini par céder lui assurant qu’il était prêt à s’engager dans quelque chose de sérieux avec elle. Leur bonheur de couple dura un an. Parallèlement, il mana ses études de front. Il fit un an de littérature mais la crise commençant à pointer le bout de son nez et le métier d’écrivain n’étant pas alimentaire, il fallait qu’il trouve autre chose. C’est un peu sur un coup de tête qu’il décida de quitter la Grèce. Il avait envie de vivre, de voyager, de profiter de sa jeunesse pendant qu’il en était encore temps. Du jour au lendemain, il s’envola pour les Etats-Unis, laissant Flora sur place. Quitter la Grèce ne fut pas une chose facile mais il se devait de le faire. Il se remémorait la difficulté que ça avait été de laisser Flora et ses parents. Il n’y était jamais retourné depuis. Ses parents étaient venus le voir une fois mais le voyage n’était pas donné et avec la crise économique qui avait surgit, ses parents ne pouvaient pas se permettre de faire des aller-retour à répétition. Sa vie à New York avait changé du tout au tout.  Il avait troqué la littérature contre des études de journalisme. Après des débuts difficiles, il trouva son rythme de croisière. D’un optimisme sans bornes, il aurait souhaité vivre de ses papiers mais il écrivait pour un petit journal et sa rubrique n’était pas très importante. Le journal pour lequel il travaillait sortait tous les dimanches ; son travail consistait à retracer tous les faits divers de la semaine ce qui occupait en gros une page. Ca lui demandait du boulot mais pas trop et ça lui laissait ainsi des plages libres. Ne pouvant vivre de son travail de journaliste, il lui fallu se trouver un deuxième emploi. Il bossait ainsi trois jours par semaine dans un hôpital: n’ayant pas de diplôme de médecine, il était chargé de l’accueil des patients, de l’attribution des chambres et de la prise de rendez-vous. Avec ces deux métiers cumulés, il arrivait à joindre le bout mais difficilement. A la limite, lorsqu’il partageait son appartement, les choses allaient encore mais actuellement, avec tous les frais qu’il avait eu, son compte était presque à sec. Se remémorer les souvenirs du passé le déprima et il en allait de même pour son avenir. A présent, il était tout seul. Un mousquetaire perdu dans la ville …