Par une belle journée de Janvier (enfin, plutôt grise et glacée...), une silhouette grêle emmitouflée dans une doudoune et qui tenait fermement une laisse au bout de laquelle se tenait une chienne labrador chocolat frétillante, sortit d'un imposant hôtel de Manhattan. Le gravier fin crissait sous ses pas. Quelques minutes lui suffirent pour arriver à Central Park, un endroit où elle adorait se promener, manger des glaces l'été, boire des cafés l'hiver et bien sûr promener sa chienne Patsy, chose qui se renouvelait à chaque fois que l'occasion se présentait. La jeune femme regarda avec un soupir ses chaussures à talons, plus esthétiques que pratiques & chaudes. Mais il faut souffrir pour être belle! Et de toute façon, rien de pourrait bousculer la belle humeur qui l'animait depuis son réveil...

En effet, ce jour-là, la future actrice voyait la vie en rose bonbon et ne pouvait s'empêcher de constater quelle chance elle avait d'évoluer dans son milieu & surtout de vivre sa vie exactement comment elle l'entendait... Son existence dans ce palace n'était pas si ennuyeuse et dès sa majorité, elle tenterait de débusquer quelque appartement de charme dans les environs, où elle pourrait festoyer à son gré. Mais en attendant, il aurait fallu qu'elle pardonne à ses parents, ce qui n'était pas gagné.

Sortant de sa rêverie, Alexandra s'arrêta devant une échoppe pour acheter un chocolat viennois qui lui brûla un le bout des lèvres mais la réchauffa quelque peu. Elle prit également un croissant que son chien lui vola et dévora d'une bouchée. La jeune femme le regarda avec de gros yeux dans lesquels on pouvait une pointe d'ironie.

Tasse en carton d'une main donc, laisse de l'autre, la Miss Campbell alla prendre place sur un banc public recouvert d'une peinture vert sombre écaillée par endroit. Là, elle sorti de son cabas un téléphone dernier cri et vérifia rapidement ses messages avant de s'attaquer à un épais volume de Shakespeare, surveillant d'un oeil son animal qui batifolait gaiment dans l'herbe givrée.
En effet, malgré des apparences trompeuses, la lycéenne était férue de littérature anglaise et française, langue qu'elle parlait couramment grâce à des séjours répétés à Saint Trop' et en Normandie. Ainsi, Alexandra avait dévoré Rousseau, Apollinaire, La Fontaine, Balzac ou encore Zola!

Mais soudain, son oeil s'arrêta brusquement sur une silhouette blonde qui marchait non loin. Le peu de chocolat qui restait finit de couler dans sa gorge et elle se leva, un sourire maintenant accroché à ses lèvres et les joues rosies de plaisir.
Elle siffla:


« Patsy, au pied! »


L'éclair brun fonça vers elle, tournant avec entrain autour de ses jambes en équilibre instable sur les cailloux. Alexandra laissa échapper un rire joyeux et s'empressa de rejoindre son amie aperçue au loin. Elle la héla:


« Arizonaa! »