-Mademoiselle Cuplle ?

Incroyable, il l'avait reconnu au simple son de sa voix. Elle vit s'étendre sur le visage de son copain un large sourire ce qui la fit sourire elle aussi. Elle se dévoila en enlevant le fumé de la vitre et lui offrit un spectacle tout simple mais qui, apparemment, ravit le jeune homme.

- J'espère que vous avez trouvé mon morceau à votre goût. Même si ça n'a pas été de grande qualité aujourd'hui je vous l'accorde. Me permettez-vous de vous rejoindre pour que vous me corrigiez ?

Tatiana rit comme une enfant en acquiesçant de la tête. Aber avait toujours cette tendance à se rabaisser, à se mettre en dessous de ce qu'il valait vraiment. Même s'il pensait avoir fait un morceau médiocre, elle, elle le trouvait excellent. Peut-être parce-qu'elle ne connaissait rien en batterie ou simplement parce-qu'elle vénérait presque tout ce que faisait Aber. Elle le vit se précipiter vers la seconde salle, pendant ce court instant, ni l'un ni l'autre n'avait détaché leur regard. Entre eux, c'était toujours comme ça, une complicité sans faille et ce besoin de contact, de proximité. Il la rejoint en l'enlaçant et en glissant sa tête dans son cou. Elle sentit son parfum -certes mélangé à la transpiration- et une main doucement dirigée vers sa chevelure. Il empoignât quelques mèches comme pour mieux la sentir. Elle garda les yeux clos quelques secondes, profitant pleinement du moment qu'on lui offrait.

Aujourd'hui, ça faisait un mois qu'il partageaient leur vie. Un mois qu'elle l'aimait sans limites et qu'il avait tout changé en elle. Elle était plus calme, plus raisonnable et voulait se donner à fond dans tout ce qu'elle entreprenait juste pour lui, pour un jour l'entendre dire qu'il était fier d'être son petit-copain. Un mois dans une vie, qu'est-ce que c'est ? En temps normal rien mais lorsqu'on le vit avec une personne unique, c'est tout différent. Certes, il était maladroit dans ses mots comme dans ses gestes et il avait un passé qu'on ne pouvait laisser au hasard mais Tatiana n'en avait cure. Elle l'avait voulu et elle l'avait pris comme il était, autant avec ses défauts qu'avec ses qualités. Avec elle, il était tout sauf le bandit qui rôde la nuit, un couteau en poche à l'affût de la moindre connerie, de la moindre bagarre. Elle ignorait complétement si c'était elle qui agissait ainsi sur sa personne mais elle était un peu plus fière de lui chaque jour. Lorsqu'elle partageait des moments avec lui, elle le voyait tout autrement, il s'avérait être plus doux, plus patient et plus calme. Avec le temps, il avait appris à cerner quelques traits de la personnalité de la jeune fille et il réfléchissait un peu plus avant d'agir. Ils s'aimaient et ça, c'était indéniable. Elle, elle ne visait plus que par lui. Il lui manquait à chaque seconde, elle établissait des projets secrets dans un coin de sa tête, trop peureuse de lui avouer et ainsi de le faire fuir. Elle vivait une idylle comme on ne voit que dans les films et elle se sentait heureuse comme ça. Elle avait également appris à cerner quelques points importants bien qu'elle ait encore une multitude de choses à apprendre sur lui. C'était bien ça qu'elle aimait le plus,il était imprévisible, toujours changeant, débordant de surprises. Aucun jour n'était semblable à la veille, ni ses gestes, ni ses paroles, ni son regard, ni son sourire. Elle savait ce qui plaisait et ce qui dérangeait, elle aimait le surprendre et lui faire plaisir. Elle nourrissait un désir incommensurable de son corps, de ses baisers, de ses caresses, de lui tout entier. Elle n'avait rien prévu de très spécial en ce jour de fête à part passer un maximum de temps avec lui, d'être adorable au possible et de lui faire tous ses caprices.

Elle lui offrirait la terre entière s'il le voulait, elle n'avait rien à perdre mis à part lui-même et c'était bien la dernière chose qu'elle souhaitait. Elle avait pris le temps cette semaine d'aller lui acheter un nouveau casque pour son MP3. L'actuel n'avait rien, même pas une égratignure mais elle avait trouvé un plus joli et comme rien d'autre ne le touchait plus que la musique, elle avait sauté sur l'occasion. Il avait d'énormes coussins -énorme pour sa petite tête à elle bien sûr- verts. Un vert presque fluo. La lanière qui les soutenait elle aussi était verte fluo et le reste était noir avec la marque écrite en blanc. Elle était presque certaine qu'il aimerait parce-que c'était vert et qu'elle associait toujours Aber à du vert. Trouvant ce cadeau un peu médiocre, elle était également passée par le magasin d'instruments et lui avait acheté une paire de baguettes pour sa batterie. Elle était au courant que seul ses baguettes à lui lui convenaient mais celles-ci étaient vraiment différentes. Elles étaient beaucoup moins fragiles et donc plus durables. Elles étaient grosses, noires en plastique dur avec les olives -plutôt grosses elles aussi- blanches. Le vendeur lui avait déballé tout un blabla qu'elle avait été incapable de retenir, il lui avait venté les mérites de ces baguettes en lui précisant que nombreux des grands batteurs connus les utilisaient. Elle s'était contentée de hocher la tête pendant cinq minutes et de dire " Je les prend ". Elle avait emballé les deux présents en rentrant au dortoir d'un paquet cadeau vert pomme et noir et les avait précieusement gardés sous son lit. Elle attendait ce jour avec impatience, juste pour voir l'expression de son chéri en déballant le tout. Elle n'espérait même rien recevoir pour elle, si Aber était heureux, c'était bien ça son plus beau cadeau.

- Qu'est-ce que j'ai fait ?

Il la sortit de ses songes en la toisant d'un air penaud. Elle l'avait fixé avec un drôle d'air tout ce temps. Elle secoua légèrement la tête et passa un main dans les cheveux bruns du garçon afin de mieux regarder ses traits. Elle sourit doucement en rapprochant son visage du sien et souffla un bref " Rien du tout mon amour " avant de déposer, avec plus de douceur que jamais, ses lèvres contre celles de son interlocuteur. Elle ferma les yeux, posant son autre main sur la joue d'Aber et sentit un frisson lui parcourir le dos à une vitesse affolante. Les battement de son cœur prirent de la vitesse et elle eut un léger vertige. Elle se retira doucement, le souffle court et plongea ses yeux dans le regard émeraude de Sparks. Elle se mordit la lèvre et s'appuya sur le bord de la table de contrôle. Elle hésitait à attendre un " Joyeux anniversaire " mais l'envie de lui dire là tout de suite était insoutenable. Tat' attrapa gentiment les mains de son petit-ami, entrelaçât leurs doigts et sourit.

- Joyeux anniversaire .... dit-elle le cœur prêt à exploser.

Elle espérait qu'il n'ait pas oublié, ou du moins qu'il jour le jeu du " J'allais te le dire ". Là encore, une multitude de choses passât dans l'esprit de la petite fraise. Un mois... Leur premier, ils ne vivront plus jamais cette magie du premier mois, jamais. Elle aurait tellement aimé le serrer contre elle au point de ne plus faire qu'un, d'avoir la forme de son cœur gravé sur sa poitrine. Jamais elle n'avait ressenti une telle chose auparavant. Elle avait peur. Pourquoi ? Elle l'ignorait mais elle avait plus peur que jamais. Peur d'être trop, d'en faire trop, de le lasser, de trop l'aimer... Elle n'imaginait plus une vie sans lui, elle ne voulait imaginer personne d'autre à sa place en ce moment. Elle avait déjà été amoureuse, oui, mais là il était inutile de comparer. Aber était un ange tombé du ciel, juste pour elle. Elle ne comprenait pourquoi il se voyait si mauvais. Certes il avait tué des gens, provoqué des bagarres et fait des erreurs mais qui n'en fait pas ? Jamais elle n'avait tenté de le changer ou de le calmer. Il était comme ça et s'il devait se battre pour se sentir vivre, elle respectait ses choix. Elle avait juste la trouille de le retrouver un jour, la tête fracassée contre un trottoir ou derrière les barreaux d'une cellule crasseuse. Elle avait peur de devoir entretenir une relation amoureuse derrière un carreau ou de lui faire l'amour dans une salle sans surveillance avec un matelas à ressort imbibé de pisse qui plus est, grinçant. Elle l'aurait même laissé avec une autre si son bonheur était là-bas. Elle, elle aurait mal mais aurait laissé l'homme qu'elle aimait être heureux.

Elle sentit une espèce de tristesse l'envahir mais reprit vite ses esprits pour ne pas gâcher cette merveilleuse journée qui s'annonçait. Elle serra un peu plus leurs mains et fronça le nez.

- Fiou, on sent que tu t'es donné à fond, tu sens la transpiration, lui dit-elle pour le taquiner.

Elle n'avait pas encore parlé de son "don" à Aber. Elle avait un peu peur qu'il ne la croit pas ou qu'il la prenne pour une folle. Peur, elle savait qu'il ne l'aurait pas, comment avoir peur d'une fille qui a un odorat sur-développé ? Elle communiquerait avec les morts, d'accord mais là, c'était totalement inoffensif. Elle avait envie de lui dire, oui mais bon, ça n'allait pas changer grand chose qu'il le sache ou non... Il saurait juste qu'il sort avec une fille encore plus étrange que ce qu'il pensait. Puis ce n'était ni le moment ni l'heure pour lui lâcher un " Oh tu sais, tu pourras jamais péter discrètement avec moi, j'ai l'odorat sur-développé ". Elle sortit son plus beau sourire et décida de lui avouer qu'elle avait fait quelques folies financières juste pour lui.

- J'ai un... deux petits cadeaux à t'offrir ! J'espère qu'ils te plairont... Et un troisième si tu es sage !

Le troisième cadeau était bien entendu une nuit de folie mais elle plaisantait,bien que ça ne la dérangeait pas le moins du monde. Il n'avaient encore rien fait ensemble même si ça avait chauffé quelques fois. Elle se réservait un peu, elle stressait pas mal aussi même si elle était déjà passée par là. Elle n'aurait pas voulu le décevoir ou se décevoir elle-même. Puis elle ne voulait pas aller trop vite avec lui. De un pour faire durer le plaisir et de deux pour que ce soit un réel moment de partage. Elle le tira par la main comme pour se diriger vers la sortie avant de se rendre compte qu'il manquait quelque chose.

- Va chercher ton sac avant, histoire de pas perdre... tes baguettes.

Elle avait hésité sur le " tes baguettes " mais de toute manière, il n'aurait pas pu se douter qu'elle lui en offrirait de nouvelles. Elle l'attendit quelques secondes avant d'à nouveau s'emparer de sa main et de le guider vers la sortie. Elle tentait désespérément de garder son calme et de marcher à une allure normale mais son impatience la trahissait. Elle se répétait que rien ne servait de se presser, qu'avoir son cadeau cinq minutes avant ou cinq minutes après n'était pas un drame mais elle bouillait malgré tout ça. Ils traversèrent la cour sous le regard des quelques élèves trainant encore là. Leur histoire n'était plus un secret pour personne, c'était " le tatoué et la fille au cheveux rose ". En même temps, il n'y avait pas énormément de couples das l'école et même si Aber et Tatiana avaient voulu passer inaperçus ou se faire discrets, cela aurait été impossible, question de look. Non seulement ils étaient presque toujours fourrés ensemble mais à la moindre seconde de libre, ils se cherchaient pour gouter un temps soit peu aux lèvres de l'autre. Certes ils avaient des amis mais le désir d'être ensemble était bien plus fort que tout.

Ils arrivèrent dans le bâtiment principal et elle l'emmena en direction des dortoirs, là où se trouvaient les fameux cadeaux d'Aber. Ils ne s'étaient pas encore retrouvés longtemps ensemble et seuls dans leur chambre mais comme on dit souvent, il faut une première à tout. L'air frais des bâtiment venait chatouiller la peau du couple ce qui n'en fut que plus agréable. Tat' amena son amant devant la porte de sa chambre et le fit passer en premier en prenant soin de refermer la porte derrière elle. Elle ne savait pas vraiment s'il était interdit de faire entrer le sexe opposé dans les chambres mais tant pis, ils ne faisaient -pour le moment- rien de mal. Sans parler du peu de surveillants qui rôdaient dans les couloirs des dortoirs en plein après-midi. Elle le fit asseoir sur sa chaise de bureau, toute pétillante de bonne humeur. Elle se mit à quatre pattes pour fouiller sous son lit et en sortit les deux paquets tant attendus. La jeune fille prit une grande inspiration et tendit le tout au destinataire.

- Voilà, j'ai été t'acheter deux petits cadeaux cette semaine, j'espère que tu en sera satisfait. Au pire tu pourras toujours aller les changer...

Elle resta plantée debout devant lui, triturant ses petits doigts, signe de stress.

OK BY LUKA