Sortir le soir dans des bars ou des boîtes de nuit pour danser et boire jusqu’à pas d’heures, ce n’était définitivement pas dans les habitudes de Delilah. Cela venait peut-être de son éducation, ou simplement de son caractère. Elle n’en savait trop rien. A l’époque du lycée, elle était toujours invitée aux fêtes – après tout elle devait être la fille la plus populaire – mais elle finissait toujours par être la conductrice désignée pour ses très proches amis, comme Damon – qui lui, ne lésinait jamais sur l’alcool. Ce n’était simplement pas son truc. Elle n’appréciait pas vraiment cela, de toute façon. Et comme il y avait rarement du champagne dans les fêtes étudiantes, et bien, elle s’en tenait au coca-cola. Elle ne s’en était jamais plainte de toute façon. Cela lui permettait de prendre des vidéos et des photos de tout le monde et ainsi construire un solide dossier sur à peu près tous les invités. De plus, les voir faire n’importe quoi – comme vomir, se mettre à moitié nu ou coucher avec n’importe qui – ne lui donnait pas très envie d’être ivre. Mieux valait être raisonnable. Comme quoi, elle savait l’être parfois.

Désormais, elle était une jeune femme reconnue, respectée et même crainte. Elle n’était toujours pas devenue une grande fêtarde, mais elle était vue un peu plus dans les boîtes de nuits branchées ou les bars à la mode. Après tout, c’était devant ce genre d’endroit que les paparazzis campaient et elle aimait bien faire la une des magazines de temps en temps. Cela serait fâcheux qu’on l’oublie. Bien entendu, on ne la verrait jamais ressortir ivre, ou au bras d’une quelconque conquête. Après tout, elle était fiancée. Et même si en vérité, cela ne représentait rien, pour le public, c’était réel. Mieux valait donc ne pas passer pour une infidèle, cela casserait son image de marque. Mais aller en boîte seule, c’est un peu triste quand même. Déjà qu’elle a la réputation d’avoir un caractère de merde – ce qui n’est pas totalement faux – elle n’imagine pas si elle sortait toute seule. Immédiatement, on la critiquerait en arguant qu’elle est tellement infecte qu’elle en perd tous ses amis. Enfin, amis. Les pimbêches qui l’entourent plutôt. Car ses véritables amies, elle fait des choses bien plus intéressantes avec elle. Bien sûr elles vont en boîtes quelques fois, mais Delilah préfère de loin qu’elles passent toute une soirée tranquille chez l’une d’elle, papotant, se faisant les ongles et critiquant les candidats de Project Runway.

Mais il est bon pour l’image de montrer qu’on sait s’amuser, alors au moins une fois toutes les deux semaines, Delilah se rend en boîte. Elle est en général accompagnée de cinq ou six de ses amies pimbêches, comme elle les appelle. Elle leur fait des jolis sourires et paye les consommations, mais elle ne se rabaisse jamais à leur rang de hyènes ricanantes. Elles sont surtout là pour la décoration, en réalité. Dans le groupe, il y a toujours une plus potable que les autres et Delilah passe en général sa soirée avec elle. Si elle est chanceuse, elle rencontre quelqu’un qu’elle connaît dans la foule de gens et elle passe réellement une bonne soirée. Sinon, et bien elle subit les ricanements de ses hyènes personnelles jusqu’aux alentours de deux heures du matin, heure où elle décide de quitter la boîte.

On est aux alentours de minuit, et le temps passe bien trop lentement aux yeux de Delilah. Malheureusement pour elle, ce soir, aucune personne de sa connaissance dans la boîte et pas une seule de ses pimbêches n’est supportable. Elle imagine toutes les choses qu’elle pourrait faire de bien plus intéressantes que de boire une coupe de champagne au milieu de semi-célébrités et vraiment, même regarder une série télévisée débile semble plus intéressant. Elle scanne une nouvelle fois la foule des yeux, espérant secrètement de trouver une distraction. Un sourire étire son visage lorsqu’enfin, elle en trouve une. Et de taille, en plus de cela. C’est officiel, elle ne va plus s’ennuyer. Rapidement, elle fend la foule, trois de ces pimbêches dans son sillage. Il y en a toujours quelques-unes qui ne la lâchent pas. Elles espèrent sûrement rencontrer une très grande célébrité ou quelque chose comme ça, Delilah ne sait pas trop. Mais au moins, elle est certaine de ne pas se retrouver seule. « Bonsoir Bilitis. » Elle se glisse à ses côtés sur la banquette qu’elle occupe, sa coupe toujours à la main. « Quelle surprise de te voir ici. » Elle esquisse un sourire narquois en remarquant qu’elle a son propre petit groupe de pimbêches elle aussi. « Et tu es avec des amies je vois. » C’est différent de la haine entre elles. Il y a de l’amusement, du défi, de la rivalité. C’est magnétique même. Impossible de rester éloignées, il faut toujours qu’elles se cherchent des noises. Delilah aime bien cela. C’est une adversaire à sa hauteur, et cela se fait de plus en plus rare, à son grand désarroi.