« Madame ! C’est une fille ! Elle est magnifique n’est-ce pas ! »

La femme qui s'afférait autour de la patiente était une sage-femme, le peu qu’on pouvait trouver dans les quartiers pauvres de Moscou. La jeune femme de 21 ans n’arrivait pas à lutter contre les ténèbres, la douleur alourdissait son corps, et ses sens. Elle sombrait. « Madame Van Decht réveillez-vous. Il faut donner un nom à cette enfant. » La presque morte tremblait, et murmura d’un ton peu confiant : « Eulalie… » Le sang commença à couler, trop abondamment. Le moniteur de l’électrocardiogramme s’emballa avant d’émettre un bruit sonore. L’homme au visage comblé de bonheur perdit tout éclat, il ne comprenait pas, il ne comprenait plus. La femme qu’il aimait plus que sa propre vie venait de perdre la vie devant lui. La sage-femme appela le médecin, tout se passa si vite, la seule parole qu’il entendit fut : « Notée l’heure du décès, dimanche 22 février 1991, à 6 h 22 du matin. Svetlana Van Decht née Nikolavo, hémorragie due à l’accouchement. »

« Monsieur, prenez votre fille. »

L’homme brun et mystérieux ne bougea pas, le visage ravagée par les larmes, il n’entendait plus rien, ne voyait plus rien, à part cette housse mortuaire qui contenait le corps de sa chère et tendre. La sage-femme se fit plus dure, « Monsieur vous devez prendre votre fille. Je suis désolé pour votre femme mais votre fille a besoin de vous. » Il s’humidifia les lèvres et prit tremblant le bébé dans ses bras, elle était magnifique, et ressemblait tant à sa mère. Il se tourna vers une enfant aux cheveux roux et aux grands yeux gris qui ne devait pas avoir plus de sept ans, et lui dit en lui donnant le paquet précieux brusquement. « Illiana, vas chercher Dimitri, prépare les bagages nous partons. Et garde cette chose avec toi, je ne veux pas la voir ! »

Kiev, Résidence privée des Van Decht, 13 Août.

Le temps a passé, tout à changé, rien n’est plus comme avant, tu te souviens n’est-ce pas ? Quand nous étions enfants, et que tu me fessais des bisous sur la bouche, innocemment. Tu te souviens de la douleur ? Celle des coups et des gifles, non, bien sur, il n’y avait que moi qui en recevais, je lui ressemblais trop, et il me le fessait payer. Et toi tu me regardais avec ce sourire fier et sadique. Soumise, chienne, battue. Aujourd’hui, on est là dans ce jardin à cacher cette étreinte immorale, tu m’aimes ? Tu ose me dire ça ! Et pourtant, je te crois, naïve, amoureuse. Oh que tu es beau, tes cheveux roux se pose sur les miens. « Contraire et pourtant semblable. » TAIS-TOI ! Hurlai-je dans ma tête. Cette voix est celle de ce spectre qui me suit, invisible et toujours là, comme une ombre, fugace. Je la hais, je veux la tuer.

Doucement tu resserre ton étreinte, tu poses des milliers de bisous papillon dans mon cou. « Je t’aime. » Les mots ont passé la barrière de ma bouche sans le vouloir, tu t’arrêtes, choqué, mais tu le savais déjà n’est-ce pas ? Tes mains agrippent ma gorge m’empêchant de respirer, j’ai mal. Tu me regardes menaçant, j’ai peur, les larmes perlent au coin de mes yeux, l’air me manque, tu souris ! Enfoiré ! Tu t’approche de mon oreille, et chuchote doucement : « Redis ça, encore une autre fois, et je dis tout à Père, je lui raconterais tout les détailles salaces, il va adorer. » Je déglutis, tu m’embrasses la gorge. Pourquoi je t’aime autant ? Pourquoi est-ce que je ne peux pas me décrocher de ce plaisir malsain ? Je t’aime, je t’aime. « Tu vas souffrir tu le sais ? Ça ne mènera jamais à rien. Ne l’oublie jamais. » Tais-toi, je t’en supplie tais-toi. Pitié. Pourquoi tu me torture ? « Car moi, contrairement à lui Je t’aime. » L’air froid de la nuit presque tomber, me fais frissonner, tu te glisse en moi, comme un serpent voulant assouvir rapidement tes désirs fugace je me laisse faire, soumise est mon nom. Peut-on aimer son bourreau ?

Tu t’arrêtes, tu as fini, je glisse au sol, pathétique, les larmes coulent en avalanche, tu souris comme d’habitude, et tu t’en vas. « Au fond tu aime ça ? Tu aime souffrir, Masochiste va. » Je pose mes mains sur mes oreilles brusquement je ne veux plus rien entendre. « SVETLANA ! La ferme ! » Je hurle en russe, tout le monde à du entendre, je vais encore me prendre une raclée. C’est Humiliant pour un personnage politique de son grade d’avoir une fille folle. Moi aussi je t’aime papa.

Kiev, Lycée, 11 Novembre.

Tu m’as encore pris dans un couloir, bientôt tu quitteras poudlard, j’aurai encore deux à tirer, je suis toute endolorie vas-y moins fort la prochaine fois. « Il n’y aura pas de prochaine fois. Dit lui ! » J’hoche la tête, elle a raison comme d’habitude. Je me dirige lentement vers les salles de classes. Les gens me regardent, c'est normal, ils pensent tous que je suis folle, mais au fond, ne le suis je pas ? Les préjugées collent à la peau. J’entre dans la classe vide, tu me prends par le bras violemment, et ferme à clé la porte de la classe vide sous les yeux des autres. Tu me pousses sur la commode, le bois me rentre dans le dos, j’ai mal. « Comme d’habitude. » Je lui lance un regard noir, saleté de Svetlana. Tu me siffles dangereusement « Tu fais quoi ici ? » Je m’humidifie les lèvres, les larmes commence à couler, je suis faible. « Je veux qu’on arrête. J’en peux plus, c’est malsain. » Tu m’attrapes par le cou, pour une fois c’est toi qui a mal. Tu m’aimes ? « Non, idiote, il se sert de toi. » Tu m’embrasses durement, je lui mords avec violence la langue. Tu cris de douleur. « Bien fait. » Je pars en courant, c’est fini. Tu ne me toucheras plus.