Nous sommes mardi, je crois. Pour dire vrai je pense totalement avoir perdu la notion du temps depuis quelques jours, sachant que je vis la nuit, et que vivre la nuit est assez déboussolant pour un frêle être humain. La nuit, c’est exaltant, palpitant ; Le jour banal et à la vue de tous, c’est sûrement pour cette raison que je vis la nuit. Pourtant, affirmer cela serait vous mentir, je garde les yeux ouvert le soleil couché car les boites de nuits ouvrent leur portes, ainsi que d’autres portes d’ailleurs… Enfin, je suis noctambule, c’est à savoir.

Aujourd’hui, réveil treize heure ; Je me réveille comme une fleur ? Non, loin de là, le temps que j’ai passé à tenter de me remettre à penser distinctement fut long, et court à la fois selon les points du vues. Je n’ai jamais fait partie intégrante de ce groupe de personne qui se réveillent en un claquement de doigts, en « sautant de lit ». Personnellement, je suis plus du genre à gueuler sur la personne qui ose me tirer mes draps et à me lamenter trente minutes avant de changer de position et de me rendormir. Mes parents disent que je suis une enfant gâtée, mes amis eux, prétendent que je suis fainéante. Je suis les deux, et bien plus encore, mais ça les personnes le découvrent à mesure qu’elles me titillent ou me fréquentent, au choix. Je suis un labyrinthe à moi toute seule, un jeu de l’oie nouvelle génération. Vous passez en un roulement de dé de la case cagnotte à la case puit. Ne vous fiez jamais à la première impression, vous vous tromperez certainement et vous vous échouerez lamentablement sur une plage de désarroi. En un seul sourire je suis capable de briser la vie d’un individu, détruire ses rêves, brûler son être. Charmer est ma seule préoccupation, ma seule envie et mon tourment. Je ressens ce besoin constant de sentir le regard de la foule se poser sur moi, j’attire l’attention et pour tout vous dire ça me plait. J’en joue, j’en abuse. Je suis le Hitler du 21eme siècle. Je m’appelle Innocence Bourgeois, et je suis le dictateur de ma vie.

Nous sommes dans un boulevard bondé, nous rions aux éclats, je dirige mon petit monde. Désirée, brune écervelée et fille d’un grand manageur français, est pendue à mon bras gauche. A sa droite, se trouve Eli –sabeth- blonde un peu trop jolie à mon goût mais beaucoup trop vulgaire pour être une concurrente potentielle en compagnie de Charlotte, elle pour faire simple, je ne peux pas me l’encadrer mais je la supporte, à mes heures perdues. Question de diplomaties. A elles trois elles forment ma cours des beaux jours, mes petits chiens aimants. Elles sont charmantes, marrantes et pas assez réfléchies pour s’apercevoir que je les mène par le bout du nez la plupart du temps. Mais elles sont braves, et derrière tout ce mépris est enfouie un infime attendrissement. J’affiche un sourire radieux, je ris en leur compagnie mais je les emmerde profondément. Je suis lasse mais je le dissimule, ce serait tellement mal poli. Au coin de la rue Désirée simule un désir profond de Manzana pour nous entraîner dans un café terrasse, relativement accueillant. J’ai envie de lui dire d’aller se faire foutre, mais son idée de Manzana n’est pas si mauvaise, et puis j’ai besoin de m’asseoir. Et c’est en entrant dans ce café que nous jubilons –rectification, elles jubilent-. Nous venons de pénétrer dans l’enceinte du café publique, et bien évidemment tous les regards nous sont destinés. Nous sommes belles, jeunes, bien habillées et parfaitement maquillées ; nous sommes le désir à l’état pur, l’envie dans un état incandescent. Je ne prête pas attention à cette euphorie visuelle collective, je sais ce que je vaux, j’ai l’habitude d’être le fantasme de tout homme. Nous nous installons à une table en terrasse –il fait beau, on en profite-. Nous laissons s’éparpiller nos sacs d’achats sur le sol et dans chacun de nos mouvements gracieux nous passons un message « nous sommes riches, vous ne l’êtes pas. ». Le soleil réchauffe ma peau dénudée au niveau de mes clavicules, et un serveur s’empressent de prendre nos commandes. « Bonjour, que désirez-vous ? », « Quatre manzana ». Charlotte, cette ingrate, charme le serveur moche et difforme –surtout pauvre-, je me demande vraiment ce qu’elle peut foutre avec nous. J’allume une malboro rouge, je tire dessus avec entrain et me coupe de la conversation. Leur conversation ne m’intéresse qu’à moitié puisque je sais déjà que machin à baiser machine et que truc machin chose a tromper l’autre cruche, bref, j’ai une longueur d’avance. Je m’isole donc dans mes pensées tout en consumant ma chère et tendre clope, mais bien sûr, la putain de voix de Désirée m’extirpe de mon halo de pseudo tranquillité.

Ok by Loan <3